Légion étrangère, pour l’aventure et pour la France



C’est le titre du documentaire de 95 mn que diffusera demain soir à 20h50, M6 (Zone interdite). Son réalisateur, Géraud Burin des Roziers est un ancien militaire. Il a quitté l’armée il y a onze ans après avoir servi pendant vingt et une années (Chasseurs alpins, Etablissement photographique et cinématographique des armées devenu ECPAD). Il a réalisé une cinquantaine de documentaires. Des Commandos de l’impossible à Papa s’en va en guerre en passant par Droit de mourir, l’enquête qui dérange.

G. Burin des Roziers pendant le tournage, octobre 2014 (DR).
En regardant votre documentaire demain soir, vous serez avec vos personnages ?

Géraud Burin des Roziers : J’ai choisi ce métier de reporter pour être au plus près des gens. Ils vivent des choses extraordinaires et acceptent de m’emmener partager leur aventure. C’est une grande marque de confiance de leur part et j’en suis très conscient. En peu de temps le contact est passé entre eux et moi. A la guerre les masques tombent. Plus personne ne triche. Une fois que ces légionnaires acceptent d’adhérer au projet, ils donnent tout ce qu’ils ont, sans limites, avec beaucoup de générosité. De cela, je suis très reconnaissant. Au montage, il m’a fallu beaucoup couper et c’est une frustration pour moi. Ces images et ces sons me rappellent les liens que nous avons tissés. Je suis venu avec ma caméra troubler leur quotidien, ils ont accepté de se montrer tels qu’ils sont, et j’essaie avec mon regard de dévoiler auprès du spectateur ce que j’ai ressenti avec simplicité, avec gravité, parfois avec humour, toujours avec respect et bienveillance. Ce qui ne m’empêche pas de garder aussi un sens critique. Mais ce qui m’intéresse par-dessus tout c’est l’authenticité des situations. Demain soir, je regarderai chaque personnage avec délectation et une profonde estime.

Donc dans l'émotion ?

Beaucoup d’émotion. J’aime mes personnages. Ces hommes ont de fortes valeurs humaines, peu courantes dans notre société actuelle où tout est centré sur l’individualisme, le succès personnel et une part d’égoïsme. Voilà des hommes altruistes au plus haut niveau, désintéressés, et engagés. Prêts à donner leur vie pour la France, un pays qui souvent n’est pas le leur. Et ils sont prêts à le faire sans négocier, dans un abandon total pour le respect de la mission, leur camarade, leur chef de section. Ce trouve cela émouvant. C’est pour cette raison que j’aime être au milieu d’eux et leur donner mon énergie et mon temps, en acceptant de partager leurs risques. Je ne peux leur offrir que mes petites compétences de cinéaste pour porter à l’écran leurs témoignages souvent rocambolesques et particulièrement touchant. 

C'est un véritable roman filmé que vous avez réalisé ?

J’ai souhaité apporter à ce film une forte dimension esthétique. C’est un film d’aventure tourné avec d’excellentes caméras, réservées souvent pour la fiction. J’ai travaillé caméra au poing et je crois que le téléspectateur ne sera pas déçu. Il fallait pour cette case documentaire diffusée en première partie de soirée franchir un nouveau cap d’excellence. J’ai aussi utilisé le drone qui sublime l’action des légionnaires en progression dans leur milieu naturel, notamment avec un plan d’anthologie réalisé sous un ciel orageux, lorsque les engagés volontaires, débutent la grande marche du képi blanc en franchissant le pont du Gard, un ouvrage architectural spectaculaire, qui en 2000 ans a vu passer bien des légionnaires… Quand je tourne ce genre de plan je repense à Pierre Schoendoerffer qui, quelques années en arrière, fût pour moi un modèle du genre ; lui qui aimait tant partir en opération avec les légionnaires… Les anecdotes racontées à travers ce documentaire vont effectivement plonger le téléspectateur au cœur de l’aventure, avec une vision parfois proche de la fiction. J’aime en particulier cette scène de bivouac filmée au petit matin dans la garrigue pendant laquelle le caporal de jour, Tek, un Népalais, ancien des commandos Gurkas, réveille la troupe, vérifie que chacun se rase comme il faut et prend sa ration d’eau pour continuer la grande marche.  A travers l’attitude de cette figure charismatique, ce gradé nous dit beaucoup de choses. Pour ses hommes, il est un berger. L’ambiance est là, on sent l’odeur du feu, on entend le son des gamelles, un régal pour les yeux et l’esprit. Si j’avais dû tourner cette scène pour le cinéma, je n’aurais rien changé. 

Cette immersion avec le REP vous a permis de vous trouver au coeur, début avril, de l'opération KUNAMA 2, au cours de laquelle les légionnaires ont sauté sur la passe de Salvador ?

Une grande première car depuis 30 ans il n’y avait eu que deux grandes opérations aéroportées de la sorte : Kolwezi au Zaïre en 78 pour libérer des otages européens aux mains des rebelles katangais, et lorsque le REP a sauté sur Tombouctou en 2013 au Mali, pour repousser les djihadistes. Cette fois le chef de corps du 2ème REP, le colonel Jean-Michel Meunier, que j’avais déjà filmé lorsqu’il était capitaine au 2ème REP en Côte d’Ivoire, m’a fait une totale confiance en m’intégrant à cette opération. 90 paras ont sauté de nuit sur la passe de Salvador : Un endroit stratégique situé à la frontière de la Lybie, de l’Algérie et du Niger, emprunté par les GAT, les groupes armés terroristes. Après le saut et une infiltration à pieds d’environ 8 km, les légionnaires se sont installés en embuscade. La suite demain soir dans Zone Interdite…


Légionnaire du 2ème REP posté en embuscade, Passe de Salvador (nord du Niger) guettant l’arrivée de GAT (groupes armés terroristes), 8 avril 2015 (crédit : Géraud Burin des Roziers)

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