Il y a 25 ans, Ouvéa

« Un jour, la mère du gendarme Daniel Leroy ma dit : Les larmes d’une mère kanak, sont les mêmes que les miennes. Il faudra toujours se souvenir de cet épisode » expliquait il y a quelques jours François Lambolley, président du Comité du 22 avril (1).
En Nouvelle-Calédonie, le 22 avril 1988, à deux jours du premier tour de l’élection présidentielle, un commando du FLNKS (Front de libération national kanak socialiste) attaquait la gendarmerie de Faya-Oué (ïle d’Ouvéa) tuant quatre gendarmes -deux n’étaient pas armés (dont Daniel Leroy)- en prenant 27 autres en otages. Ceux-ci sont alors divisés en deux groupes. Les otages du premier sont relâchés trois jours plus tard. Il faudra un assaut pour libérer les gendarmes-otages du second qui ont été regroupés dans une grotte. 

François Lambolley : « Les politiques n’auraient jamais dû envoyer l’armée. Il aurait fallu laisser faire les gendarmes ». En effet, l’opération Victor est menée par des hommes du 11ème choc (aujourd’hui service action de la DGSE), les commandos Hubert (Marine) et le GIGN. Deux militaires du 11ème choc sont tués. Côté indépendantistes, on compte 19 morts. Aussitôt après l’assaut, le ministre des territoires et départements d’outre-mer, Bernard Pons (RPR) tient une conférence de presse au haut-commissariat et annonce 15 tués chez les preneurs d’otages. Dans un livre écrit en 1989, Opération Victor (http://www.editionsuniverselles.fr/divers/operation-victor) je raconte ainsi, me trouvant à Ouvéa : «  Le dimanche 8 mai (jour du deuxième tour de la présidentielle), les cercueils des 19 sont rassemblés à la tribu de Wadrillah, dans la pièce centrale de la mairie. (…) Lors des obsèques, dans la foule, circulent les premières informations d’exécutions sommaires ».
Le 26 juin suivant, sous l’égide du Premier ministre Michel Rocard, « loyalistes » et indépendantistes signent à Paris les accords de Matignon qui mettront un terme à des années douloureuses.Texte qui prévoit, également, une amnistie générale.
Le 22 avril dernier, à l’occasion du 25ème anniversaire, des cérémonies se sont déroulées à Ouvéa. « Avec des interventions émouvantes et mesurées. Chacun associant les 4 gendarmes et les 19 Mélanésiens » raconte un témoin qui était présent à Ouvea en 1988. »Toutes ces interventions ont porté sur le pardon et la réconciliation ». Démarche de réconciliation engagée en 2008.Le haut-commissaire, Jean-Jacques Brot qui était présent a annoncé qu’il reviendrait, aujourd’hui (5 mai), pour les cérémonies coutumières.


Plaque à la mémoire des 4 gendarmes et des 2 hommes du 11ème choc
dévoilée à la gendarmerie de Faya-Oué (DR)
Wadrillah, mémorial des 19 indépendantistes (DR).
Comment nommer Ouvéa et plus généralement le période 1981-1989 ? Jusqu’ici, pudiquement, on parlait « d'événements ». L’Atlas de la Nouvelle-Calédonie réalisé par l’Institut de recherche pour le développement (IRD, 2013) ne tranche pas entre événements ou guerre. « C’est un sujet qui reste très sensible… » confirme Jean-Christophe Gay, coordinateur de l’ouvrage.

(1) Créée en mémoire des gendarmes d’Ouvéa, l'association défend aujourd'hui les droits des gendarmes et militaires morts en service et de leurs familles.

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