La tribune des gilets kakis
Ils ne sont ni les héritiers du « quarteron de généraux en retraite » d’Alger, ni ceux des généraux et amiraux qui ont suivi le maréchal Pétain à partir de juin 1940 avant de se ressaisir pour certains ou de sombrer, pour d’autres, dans une Révolution nationale (RN) qui prit vite la sinistre couleur du déshonneur. Ces généraux signataires (une vingtaine) qui appellent à soutenir le « patriotisme » (« Vaste programme… » aurait dit le général de Gaulle !) dressent au début de leur texte un « état des lieux » connu par d’autres canaux et peu contesté. En revanche, la conclusion pointe « le laxisme », lequel « continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une explosion et l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de protection de nos valeurs civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national ». Ce vocabulaire semble appeler à un pronunciamento. Et, de fait, il met en porte-à-faux les militaires d’active qui, dans une écrasante majorité, sont républicains et loyaux au chef des armées. Ces « gilets kakis » ne semblent pas représentatifs de l’ensemble de l’institution même si Jérôme Fourquet expliquait hier à L’Opinion qu’en 2017, le vote en faveur du Rassemblement national avait été deux fois plus important (40 %) chez les militaires, gendarmes et policiers que dans l’électorat global. Les auteurs de cette tribune contribuent surtout à entretenir le climat extrêmement malsain alimenté par les extrêmes, de droite et de gauche, ainsi que par les populistes, les complotistes, les racialistes... Une société où la violence des attitudes et des mots remplace sèchement le débat. Ce fameux « vent mauvais », selon la formule souvent employée jusqu’ici dans des périodes douloureuses de notre histoire. Les recettes pour combattre ces extrémismes sont toujours les mêmes et elles ont depuis longtemps démontré leur inefficacité. Sauf à renforcer ces courants. A noter que, curieusement, l’appel à l’insurrection lancé le 15 avril dans Valeurs Actuelles par Philippe de Villiers est passé relativement inaperçu, comme le remarquait, hier, Nicolas Beytout dans un éditorial de ce même quotidien L’Opinion. Peut-être déçu par ce faible écho, l’hebdomadaire précité a donc publié six jours plus tard le texte de ces militaires. Il n’a rien trouvé de mieux que de l’illustrer avec la photo d’un légionnaire. Histoire d’ajouter un amalgame coupable à tout le reste !