Olivier Mas « Les prisons qui s’ouvrent aujourd’hui en Syrie, ce sont celles que je décris dans "Le walk-in" »
Le walk-in* a été talonné puis rattrapé par l’actualité. Olivier Mas a, pour son troisième ouvrage, conçu une histoire qui se déplace entre Liban et Syrie. Intuition de l’ancien agent secret français devenu écrivain ? Reste que le noeud de l'action et la réalité du moment font de ce livre un bien agréable compagnon.
- Dans une récente interview au “Point”, Nicolas Lerner, le directeur général de la DGSE, rappelait l'importance des sources humaines. Nous sommes au coeur du walk-in ?
Alors que le directeur général rappelait sa crainte de passer à côté d’une rupture technologique et se félicitait que les Armées se lancent dans un plan ambitieux de développement de l’Intelligence Artificielle, il a également tenu, en effet, à replacer le recrutement de sources humaines au centre des activés de la DGSE. Nous sommes bien au coeur de mon walk-in, puisque ce roman nous mène dans les murs d’un poste de la DGSE à l’étranger. À Beyrouth, en l’occurrence. Et la mission principale d’un poste extérieur, c’est le traitement de sources humaines et le recrutement de nouveaux profils.
- Votre roman colle totalement à l'actualité car il se déroule au Liban et pour partie en Syrie ?
Ce n’était pas prévu initialement, même si cette région du monde est particulièrement instable et toujours susceptible de faire les gros titres ! Le récit débute à l'été 2016, alors que la guerre civile syrienne bat son plein et que la DGSE fait tout pour développer ses accès en Syrie, alors même qu’elle a dû fermer son poste à Damas. Les prisons qui s’ouvrent aujourd’hui, ce sont celles que je décris dans Le walk-in. Les liens entre le régime syrien et ses alliés, Russie, Iran et Hezbollah, sont également bien présents et peuvent permettre au lecteur de mieux comprendre les événements qui se jouent actuellement.
- Dans la situation que vit la région, les priorités du poste de Beyrouth ont-elles été immédiatement réorientées ?
Un poste de la DGSE doit effectivement pouvoir réagir au quart de tour en orientant ses meilleurs sources. Charge à lui d’avoir toujours les contacts les plus à même de répondre à l’évolution des demandes du service, au gré des soubresauts de l’actualité.
- Dans ce roman, 3 personnages : un chef de poste, professionnel ambitieux, un officier traitant féminin, réservé et vigilant et un second OT, au prise avec son “walk-In” syrien…
Il s’agit bien de mes quatre personnages principaux, auxquels il faut ajouter la belle Lana, libanaise séduisante qui évolue dans l’environnement d’Alexandre, le jeune officier traitant du poste. Le walk-in, ce volontaire membre des services syriens qui propose de transmettre du renseignement à la France, occupe le centre de la toile. Est-il une véritable aubaine ou un escroc manipulateur ? C’est la question centrale du livre.
- Situation vécue ?
Les postes de la DGSE à travers le monde, et la Centrale à Paris, boulevard Mortier, sont tous confrontés, assez régulièrement, à des démarches volontaires initiées par des walk-ins. J’ai suivi de près plusieurs de ces affaires. Souvent, il s’agissait de manipulateurs attirés par des récompenses financières. Mais parfois, le walk-in peut s’avérer être une véritable mine d’or et détenteurs de véritables secrets.
- Peut-on réellement se prémunir contre une fausse défection ?
La bonne évaluation des walk-ins est la clé dans ces affaires. Des procédures sont en place pour recouper les données transmises par les volontaires pour se faire rapidement une idée. Il faut évidemment toujours rester prudent, particulièrement dans le cas du transfuge d’un membre de service de renseignement adverse. On a alors affaire à un expert du mensonge et de la manipulation !
- Majed l'officier syrien au centre de l'ouvrage, même s'il est lettré, est un sinistre mukhabarat. Que va-t-il arriver à cet agent et à ses semblables maintenant que le régime est tombé ?
Tous ceux qui se sont livrés à des actes de tortures ou des assassinats au profit du régime de Bachar Al-Assad doivent aujourd’hui se faire tout petit. On remarque que la bande côtière, région essentiellement alaouite, est encore hors de contrôle des forces d’opposition. C’est sans doute là que se terrent les personnages les plus impliqués dans la survie du régime et ceux qui n’ont pas les moyens de quitter le pays.
- A quelques semaines d'intervalles, deux livres portant le même titre (l'un au masculin, l'autre au pluriel) ont été publiés. Avez-vous croisé quelques-uns des Walk-Ins racontés par Michel Guérin ?
Le livre de Michel Guérin, passionnant au demeurant, s’attache à décrire le phénomène d’un point de vue d'un service de renseignement intérieur. Il est lui même un ancien de la DGSI. Pour lui, un walk-in est un transfuge d’un autre service de renseignement. Pour nous, au sens DGSE, tout volontaire qui propose de transmettre des secrets est traité sous ce vocable de walk-in. Notre définition est plus large. Et non, je n’ai pas croisé les walk-ins cités par monsieur Guérin !
- Avez-vous subi ou des tentatives de “retournement” ?
Non : pas du temps de mon activité. On a dû me juger incorruptible ! En revanche, dès ma première année de retraite, j’ai fait l’objet de deux approches. L’une de la part des Russes, et une autre potentiellement du Mossad.
*Flammarion
- Dans une récente interview au “Point”, Nicolas Lerner, le directeur général de la DGSE, rappelait l'importance des sources humaines. Nous sommes au coeur du walk-in ?
Alors que le directeur général rappelait sa crainte de passer à côté d’une rupture technologique et se félicitait que les Armées se lancent dans un plan ambitieux de développement de l’Intelligence Artificielle, il a également tenu, en effet, à replacer le recrutement de sources humaines au centre des activés de la DGSE. Nous sommes bien au coeur de mon walk-in, puisque ce roman nous mène dans les murs d’un poste de la DGSE à l’étranger. À Beyrouth, en l’occurrence. Et la mission principale d’un poste extérieur, c’est le traitement de sources humaines et le recrutement de nouveaux profils.
- Votre roman colle totalement à l'actualité car il se déroule au Liban et pour partie en Syrie ?
Ce n’était pas prévu initialement, même si cette région du monde est particulièrement instable et toujours susceptible de faire les gros titres ! Le récit débute à l'été 2016, alors que la guerre civile syrienne bat son plein et que la DGSE fait tout pour développer ses accès en Syrie, alors même qu’elle a dû fermer son poste à Damas. Les prisons qui s’ouvrent aujourd’hui, ce sont celles que je décris dans Le walk-in. Les liens entre le régime syrien et ses alliés, Russie, Iran et Hezbollah, sont également bien présents et peuvent permettre au lecteur de mieux comprendre les événements qui se jouent actuellement.
- Dans la situation que vit la région, les priorités du poste de Beyrouth ont-elles été immédiatement réorientées ?
Un poste de la DGSE doit effectivement pouvoir réagir au quart de tour en orientant ses meilleurs sources. Charge à lui d’avoir toujours les contacts les plus à même de répondre à l’évolution des demandes du service, au gré des soubresauts de l’actualité.
- Dans ce roman, 3 personnages : un chef de poste, professionnel ambitieux, un officier traitant féminin, réservé et vigilant et un second OT, au prise avec son “walk-In” syrien…
Il s’agit bien de mes quatre personnages principaux, auxquels il faut ajouter la belle Lana, libanaise séduisante qui évolue dans l’environnement d’Alexandre, le jeune officier traitant du poste. Le walk-in, ce volontaire membre des services syriens qui propose de transmettre du renseignement à la France, occupe le centre de la toile. Est-il une véritable aubaine ou un escroc manipulateur ? C’est la question centrale du livre.
- Situation vécue ?
Les postes de la DGSE à travers le monde, et la Centrale à Paris, boulevard Mortier, sont tous confrontés, assez régulièrement, à des démarches volontaires initiées par des walk-ins. J’ai suivi de près plusieurs de ces affaires. Souvent, il s’agissait de manipulateurs attirés par des récompenses financières. Mais parfois, le walk-in peut s’avérer être une véritable mine d’or et détenteurs de véritables secrets.
- Peut-on réellement se prémunir contre une fausse défection ?
La bonne évaluation des walk-ins est la clé dans ces affaires. Des procédures sont en place pour recouper les données transmises par les volontaires pour se faire rapidement une idée. Il faut évidemment toujours rester prudent, particulièrement dans le cas du transfuge d’un membre de service de renseignement adverse. On a alors affaire à un expert du mensonge et de la manipulation !
- Majed l'officier syrien au centre de l'ouvrage, même s'il est lettré, est un sinistre mukhabarat. Que va-t-il arriver à cet agent et à ses semblables maintenant que le régime est tombé ?
Tous ceux qui se sont livrés à des actes de tortures ou des assassinats au profit du régime de Bachar Al-Assad doivent aujourd’hui se faire tout petit. On remarque que la bande côtière, région essentiellement alaouite, est encore hors de contrôle des forces d’opposition. C’est sans doute là que se terrent les personnages les plus impliqués dans la survie du régime et ceux qui n’ont pas les moyens de quitter le pays.
- A quelques semaines d'intervalles, deux livres portant le même titre (l'un au masculin, l'autre au pluriel) ont été publiés. Avez-vous croisé quelques-uns des Walk-Ins racontés par Michel Guérin ?
Le livre de Michel Guérin, passionnant au demeurant, s’attache à décrire le phénomène d’un point de vue d'un service de renseignement intérieur. Il est lui même un ancien de la DGSI. Pour lui, un walk-in est un transfuge d’un autre service de renseignement. Pour nous, au sens DGSE, tout volontaire qui propose de transmettre des secrets est traité sous ce vocable de walk-in. Notre définition est plus large. Et non, je n’ai pas croisé les walk-ins cités par monsieur Guérin !
- Avez-vous subi ou des tentatives de “retournement” ?
Non : pas du temps de mon activité. On a dû me juger incorruptible ! En revanche, dès ma première année de retraite, j’ai fait l’objet de deux approches. L’une de la part des Russes, et une autre potentiellement du Mossad.
*Flammarion