Auschwitz, Auschwitz, syllabes sanglantes*
« Un camp est un endroit où l’on entre par la porte et d’où l’on sort par la cheminée » écrivait Rémy Roure dans un article du Monde, publié le 21 avril 1945. Citant un camarade qui, comme lui, est passé par les camps d’Auschwitz-Birkenau « bien pires que Buchenwald ». Le journaliste, résistant, en est revenu. Sa femme n’a pas eu cette chance. Elle est morte à Ravensbrück. Rémy Roure est l’un des 42 titulaires de la croix de la Libération déportés. 13 l’ont été a titre posthume.
Les camps d’Auschwitz
Cette usine de la mort de 40 km2, libérée il y a 80 ans par l’Armée rouge, « un nom qui incarne l’histoire » relève l’historien Tal Bruttmann dans Auschwitz** a été construite sur le site d’une ancienne caserne de l’armée polonaise à Oswiecim, au sud de la Pologne. Annexée à l’Allemagne après l’entrée des nazis dans le pays, le 1er septembre 1939, la ville est devenue Auschwitz. Le camp souche a été ouvert en 1940, Auschwitz 2 (Birkenau) en 1941, Auschwitz 3 (Monowitz-Buna) l’année suivante. 1,3 millions de déportés (hommes, femmes, enfants y ont été détenus) soit la population actuelle d’un pays comme l’Estonie. 1,1 million de détenus, dans une immense majorité juifs (un million), ont été massacrés dans les chambre à gaz.
L’oubli est un monstre***
Le camp a été libéré le 27 janvier 1945 par les soldats soviétiques. Qui y ont trouvé 7 000 détenus, des morts-vivants déclarés inaptes à la marche de la mort à laquelle les SS ont obligé 52 à 56 000 prisonniers et prisonnières par une température de – 20°. A bout de force, ceux-ci étaient vêtus de leur unique « pyjama », certains n’ayant même pas de chaussures. Les plus faibles, qui tombent ou sont incapables d’avancer étant abattus immédiatement.
L'Histoire en clair-obscur
Les libérateurs d’Auschwitz sont aussi les mêmes qui ont occupé entre 1939 et 1941 une partie du territoire de la Pologne, née de l’après Première Guerre mondiale****. Une quinzaine de jours après l’entrée des Allemands, et à la faveur du protocole secret contenu dans le pacte germano-soviétique signé le 23 août 1939, l’Armée rouge a annexé des territoires de ce qui est aujourd’hui la Biélorussie, l’Ukraine et la Lituanie, procédant à des exécutions. Ainsi à Katyn où en avril-mai 1940 ont été abattus plus de 20 000 officiers et membres de l’élite polonaise.
Les Soviétiques, rappelle l’historien Alexandre Bande qui ont rapidement expliqué que les déportés assassinés à Auschwitz étaient des victimes du fascisme sans dire qu’ils s’agissaient de juifs. « La réalité du crime de masse dont les juifs avaient été victimes devaient être tue » précise-t-il dans Auschwitz 1945*****.
Les Alliés quant à eux, informés ne voulurent pas bombarder Auschwitz. A la fin du printemps et au début de l'été 1944, 430 000 juifs hongrois furent déportés à Auschwitz, au rythme de 12 000 par jour. L'assassinat est devenu une industrie...
*Extrait d’un poème d’Aragon écrit sous le pseudonyme de François la colère.
** Auschwitz, La Découverte, 2015, réédité en 2025
***L’oubli est un monstre qui dévore les générations (Georges Sand)
*Extrait d’un poème d’Aragon écrit sous le pseudonyme de François la colère.
** Auschwitz, La Découverte, 2015, réédité en 2025
***L’oubli est un monstre qui dévore les générations (Georges Sand)
****Après le traité de Versailles (1919) et le traité de Riga (1921) signé à l'issue de la guerre entre l'URSS et la Pologne.
*****Auschwitz 1945, Alexandre Bande, Passés/Composés, 2025.
*****Auschwitz 1945, Alexandre Bande, Passés/Composés, 2025.
Photo : arrivée de juifs hongrois à Auschwitz en mai 1944. Copyright : Holocaust encyclopedia.