Les femmes engagées et les "mortes pour la France" depuis 1940 (1) La Seconde Guerre mondiale

 

Rochambelles ©DR

"Longtemps, les femmes n'ont pas été considérées comme des soldats à part entière" note Elodie Jauneau. L'historienne aborde ainsi son étude sur les "mortes pour la France et les anciennes combattantes" de 1940 à 1962. Ce qui explique pourquoi "bon nombre «d'héroïnes » de guerre sont ignorées de la mémoire combattante." L'un des exemples les plus significatifs est l'ordre de la Libération. Sur 1038 compagnons qui ont reçu la croix de la Libération, il n'y a que six femmes. Six "compagnes" de la Libération. Alors que nombre de femmes ont participé à l'action clandestine en France occupée (Résistance intérieure) et qu'existait à Londres  depuis 1940, un Corps des volontaires françaises (Résistance extérieure).

Le CVF 

Au sein de la France libre, 600 femmes seront engagées auprès du général de Gaulle dont une centaine au sein des services secrets (BCRA) où elles sont dactylos ou sténos. Peu participent au combat clandestin malgré leur souhait. Comme l'a expliqué Sébastien Albertelli, dans "Elles ont suivi de Gaulle" (Perrin/ministère des armées, 2020), certaines de ces volontaires quitteront la France clandestinement, en traversant la Manche ou par l'Espagne. Ce qui signifie passer par la case prison pendant quelques mois, avant d'arriver à destination. Puis subir, en Angleterre, moults interrogatoires de sécurité. Hélène Terré dirigea le CVF puis obtint en 1944, la création de l'arme féminine de l'armée de Terre (AFAT). Elle seront 6 000 à la fin de l'année,11 000 à la fin de la guerre. Quelques-unes de ces femmes y laissèrent leur vie. L'AFAT sera ensuite dissoute. 

Le CFT 

Ce sont les "Merlinettes" du nom du général Lucien Merlin, patron des transmissions des armées françaises, qui décide de créer fin1942, le Corps féminin des transmissions (CFT) en Afrique du Nord "libérée". Près de 400 intégreront le corps expéditionnaire en Italie, commandé par le général Juin. En avril 1944, le CFT compte 1095 militaires. Dont 37 officiers (femmes). Ce sera ensuite pour certaines d'entre elles le débarquement en Provence puis le franchissement du Rhin. Parallèlement, certaines "Merlinettes" furent affectées au SOE (Special operations executive) britannique et parachutées en France occupée. Plusieurs d'entre elles, Marie-Louise Cloarec, Eugénie Djendi, Suzanne Mertzizen, Pierrette Louin et Elisabeth Torlet furent arrêtées par la Gestapo, déportées puis fusillées. Elles seront 19 à ne pas connaitre la Libération.

Les ambulancières

Le Sundgau du Territoire de Belfort, a été en novembre 1944, le théâtre de combats dans lesquels les acteurs ont été des femmes. Ambulancières, brancardières et conductrices du 25e Bataillon médical de la 9e division d'infanterie coloniale. Les jeunes femmes sont rapidement encerclées à Oberwald. Elles soignent à l'abri dérisoire d'un pan de mur, sous une ambulance... 7 sont blessées dont le lieutenante Suzanne Rouquette qui commande les ambulancières. Elle sera amputée d'une jambe. Depuis 1991, un monument honore leur courage à Réchésy. Il est surplombé d'un médaillon représentant Denise Ferrier. Citée à l'ordre de la division pour son comportement pendant cette attaque allemande, elle fut tuée quelques semaines plus tard, lors de la libération de Richwiller. C'était le 20 janvier 1945. Elle avait 20 ans. Les ambulancières de la 2e division blindée, les "Rochambelles" étaient également au contact du danger. Scarabée alias de Marie-Louise Grimpel a disparu aux abords d'Argentan en 1944. Cette ancienne du réseau Alliance, a quitté la France alors qu'elle était recherchée par la Gestapo. Affectée à son arrivée en Angleterre au BCRA, elle rejoint ensuite le groupe Rochambeau et rentre en France en août 44 avec Leclerc, au volant de Gargamelle (ambulance Dodge). Elle a 26 ans. Le 13 août, son véhicule est retrouvé mitraillé aux portes d'Argentan avec les corps du brancardier qui l'accompagnait et du blessé qu'elle transportait. On ne la retrouva jamais.

Quelle image pour ces combattantes ?

Si l'on parle communément "d'anciens combattants", on n'honore jamais les "anciennes combattantes" . La représentation est masculine. Nous le verrons dans le prochain volet, ce constat pour la Seconde Guerre mondiale vaut pour l'Indochine et l'Algérie. Si majoritairement, les hommes ont été les plus nombreux, il est nécessaire que le travail de mémoire (et non devoir) auquel ont fait appel si souvent dans le discours public, n'occulte pas l'engagement des femmes.

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