Les « Maisons russes », outil culturel de la propagande de Moscou en Afrique
A l’agenda de Vladimir Sokolenko, ce samedi 11 novembre 2023, figure l’inauguration du Centre culturel russe à N’Djamena. Une satisfaction pour l’ambassadeur de Moscou au Tchad d’ouvrir une Russkiy Dom dans un pays « encore proche » de la France.
* Son nom complet est Agence fédérale pour la Communauté des États indépendants
**Parti communiste de l’Union soviétique.
Photo : DR, ouverture d'une Maison russe au Tchad.
Selon les données officielles, il existe 86 succursales officielles de la Maison russe à l’étranger dont quatre en Afrique du nord et quatre autres en Afrique subsaharienne. Chaque implantation ne s’effectuant qu’avec le feu vert du président russe.
Ces Maisons russes sont des antennes de Rossotrudnichestvo, une agence fédérale* « chargée de fournir des services d'État et de gérer les biens de l'État pour soutenir et développer les relations internationales entre la Fédération de Russie et les États membres de la Communauté des États indépendants et d'autres pays étrangers, ainsi que dans le domaine de la coopération humanitaire internationale » précise son site. L’agence dépend du ministère des affaires étrangères, mais ses cadres proviennent souvent de Russie Unie, parti poutinien, ou sont d’anciens hauts fonctionnaires proches du Kremlin, dont l’administration présidentielle nomme ou révoque ses directeurs.
Soft Power
Il existe également des « franchises privées », comme le Tchad sur tout le continent, « ouvertes par des ONG qui se prétendent indépendantes, mais qui coïncident souvent avec la politique étrangère de la Russie » note un diplomate. Ainsi au Burkina Faso, au Niger, au Mali. Celles de Somalie, de Sierra Leone et de Guinée équatoriale ont vu le jour après un rapprochement de ces pays avec la Russie. Des franchises portées sur les fonts baptismaux par des diplômés locaux d’universités russes ou soviétiques.
Les cours de russe y sont, généralement, gratuits. Mais leur attrait précise Ivan Klyzcz, chercheur estonien « est de proposer des bourses permettant d’étudier en Russie. » Selon Rossotrudnichestvo, plus de 26 000 étudiants de différents pays africains ont reçu une bourse pour y étudier pour l’année universitaire 2024-2025. Ils sont des cibles de la guerre informationnelle menée par Moscou.
En lien avec les services de renseignement
Un autre volet concerne l’invitation de fonctionnaires africains à des colloques ou des conférences organisées par la Russie. Ainsi début octobre dernier, un forum international financé par Rossotrudnichestvo (qui sert de couverture à des agents de renseignements) a eu lieu à Moscou. Y participaient des Africains qui ont reçu des fonds et per diem de leur antenne de la Maison Russie pour le déplacement. Au programme, les éléments de langage du discours diplomatique russe, faisant l’impasse sur la politique agressive du Kremlin et mettant en avant l’hostilité de l’Occident à l’égard de la Russie et du « Sud global ». En prenant bien soin de colorer l’histoire afin de la rendre séduisante et convaincante. Le révisionnisme historique devenu une obsession pour le pouvoir actuel comme il l’avait été pour les secrétaires généraux du PCUS**, est un outil de ce soft power. Ce qui vaut d’ailleurs à l’agence fédérale des sanctions de l’Union européenne.
Propagande, études et promesses trompeuses
Enfin, les antennes projettent souvent des films de Russia Today sur les questions des relations internationales notamment sur « l’opération spéciale » menée en Ukraine. Le 12 juillet dernier, à Niamey, était organisée par l’ONG « Ensemble main dans la main Niger-Russie » la projection de « Tourist ». Un film, rappelle le site centrafricain Corbeau News, « de propagande russe réalisé par Wagner pour appuyer la présence russe en Centrafrique. À la lumière de tous ces éléments, il est possible d’affirmer que les associations sont devenues la nouvelle trouvaille du Kremlin pour faire valoir la présence russe sur le continent. »
Attention, toutefois au mirage de cette diplomatie culturelle, avertit l’universitaire estonien Ivan Klyszcz « le Kremlin fait miroiter les possibilité de faire des études, de participer à des programmes d’apprentissage ou de vivre en Russie pour alimenter sa machine de guerre. Selon l’agence de presse Associated Press, des centaines d’Africains ont été trompés et se sont retrouvés à travailler dans des conditions indignes dans des usines d’armements russo-iraniennes. » D’autres, également dupés, se sont retrouvés sur le front ukrainien.
Il existe également des « franchises privées », comme le Tchad sur tout le continent, « ouvertes par des ONG qui se prétendent indépendantes, mais qui coïncident souvent avec la politique étrangère de la Russie » note un diplomate. Ainsi au Burkina Faso, au Niger, au Mali. Celles de Somalie, de Sierra Leone et de Guinée équatoriale ont vu le jour après un rapprochement de ces pays avec la Russie. Des franchises portées sur les fonts baptismaux par des diplômés locaux d’universités russes ou soviétiques.
Les cours de russe y sont, généralement, gratuits. Mais leur attrait précise Ivan Klyzcz, chercheur estonien « est de proposer des bourses permettant d’étudier en Russie. » Selon Rossotrudnichestvo, plus de 26 000 étudiants de différents pays africains ont reçu une bourse pour y étudier pour l’année universitaire 2024-2025. Ils sont des cibles de la guerre informationnelle menée par Moscou.
En lien avec les services de renseignement
Un autre volet concerne l’invitation de fonctionnaires africains à des colloques ou des conférences organisées par la Russie. Ainsi début octobre dernier, un forum international financé par Rossotrudnichestvo (qui sert de couverture à des agents de renseignements) a eu lieu à Moscou. Y participaient des Africains qui ont reçu des fonds et per diem de leur antenne de la Maison Russie pour le déplacement. Au programme, les éléments de langage du discours diplomatique russe, faisant l’impasse sur la politique agressive du Kremlin et mettant en avant l’hostilité de l’Occident à l’égard de la Russie et du « Sud global ». En prenant bien soin de colorer l’histoire afin de la rendre séduisante et convaincante. Le révisionnisme historique devenu une obsession pour le pouvoir actuel comme il l’avait été pour les secrétaires généraux du PCUS**, est un outil de ce soft power. Ce qui vaut d’ailleurs à l’agence fédérale des sanctions de l’Union européenne.
Propagande, études et promesses trompeuses
Enfin, les antennes projettent souvent des films de Russia Today sur les questions des relations internationales notamment sur « l’opération spéciale » menée en Ukraine. Le 12 juillet dernier, à Niamey, était organisée par l’ONG « Ensemble main dans la main Niger-Russie » la projection de « Tourist ». Un film, rappelle le site centrafricain Corbeau News, « de propagande russe réalisé par Wagner pour appuyer la présence russe en Centrafrique. À la lumière de tous ces éléments, il est possible d’affirmer que les associations sont devenues la nouvelle trouvaille du Kremlin pour faire valoir la présence russe sur le continent. »
Attention, toutefois au mirage de cette diplomatie culturelle, avertit l’universitaire estonien Ivan Klyszcz « le Kremlin fait miroiter les possibilité de faire des études, de participer à des programmes d’apprentissage ou de vivre en Russie pour alimenter sa machine de guerre. Selon l’agence de presse Associated Press, des centaines d’Africains ont été trompés et se sont retrouvés à travailler dans des conditions indignes dans des usines d’armements russo-iraniennes. » D’autres, également dupés, se sont retrouvés sur le front ukrainien.
* Son nom complet est Agence fédérale pour la Communauté des États indépendants
**Parti communiste de l’Union soviétique.
Photo : DR, ouverture d'une Maison russe au Tchad.