samedi 21 août 2021

Nouvelle-Calédonie, l’affaire Steiger

Ce samedi matin, à Nouméa (+ 9h) des associations de défense des droits des femmes ont manifesté devant la caserne Meunier, siège de l’état-major de la gendarmerie. Une manifestation maintenue malgré l’annonce, quelques heures plus tôt, du départ du colonel Steiger qui commandait depuis juillet, les gendarmes du territoire. Celui-ci, âgé de 48 ans, a été condamné en 2020 pour violences conjugales, puis en appel en mai dernier *. Des élus calédoniens, de toutes tendances, ont demandé son départ dès la révélation, il y a trois jours, de cette double condamnation par le site Médiapart. Un communiqué du ministère de l’intérieur, hier après-midi, le confirmait en des termes très diplomatiques : « le colonel Steiger a choisi de demander à être relevé de ses fonctions ».
L’une des responsables de la manifestation nouméenne a expliqué à NC 1ère que ce rendez-vous a été maintenu pour Sophie Steiger, « qui a souffert de ces violences, que nous la soutenons comme toutes les femmes victimes de violences conjugales ». Dans ce territoire du Pacifique Sud « 22 % des Calédoniennes ont subi des brutalités physiques », selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
Le colonel Steiger a été condamné, en première instance en février 2020, à six mois de prison avec sursis avant de voir sa peine réduite à 6 000 € d'amende en appel.

dimanche 15 août 2021

Afghanistan, la France lance l'opération Apagan,

 Alors que le président Ashraf Ghani vient de quitter l’Afghanistan et que les tabilans entrent dans Kaboul, un C130 et un A400M français décolleront cette nuit et demain matin pour la base d’Al Dhafra aux Emirats arabes unis où le dispositif sera renforcé par des militaires stationnés aux EAU. Les deux avions de transport effectueront ensuite « des norias entre Abou Dabi et l’aéroport de Kaboul » explique ce soir le ministère des armées. Cette « opération d’évacuation de ressortissants » (sans plus de précisions) a été baptisée Apagan.

samedi 7 août 2021

Le CEMA pour les 101 ans d’Hubert Germain


22 juillet 2021, visite du CEMA à Hubert Germain @Twitter

Le chef d’état-major des armées quittera aujourd’hui son lieu de courtes vacances pour venir à l’Institution nationale des Invalides (Paris) afin de souhaiter son 101ème anniversaire à Hubert Germain. Celui-ci est né le 6 août 1920 dans la capitale. 
Le général Burkhard voit régulièrement le dernier Compagnon de la Libération. Sa précédente visite remonte au 22 juillet, jour de son entrée en fonction. La filiation -le lieutenant Germain a combattu au sein de la 13e demi-brigade de Légion étrangère (DBLE), notamment à Bir Hakeim et le futur CEMA a commandé entre 2008 et 2010 le régiment- n’explique pas tout.
Le général Burkhard, qui de par sa fonction actuelle (et les précédentes) est face à des choix difficiles mesure combien celui d’Hubert Germain le fut en juin 1940, dès l’annonce de la demande d’armistice effectuée par le maréchal Pétain. Il n’avait pas 20 ans et en quelques heures, il a refusé la défaite. Lui et d’autres, gamins qui sortaient de l’adolescence ou qui l’avaient quitté si peu de temps auparavant, ont alors abandonné famille, amis, études ou carrière au nom de l’honneur. Il est utile de préciser qu’il faut raisonner en terme d’individualités, non de groupes homogènes. Entre eux et l’avenir, un épais brouillard celui de l'incertitude...Lui s’en est sorti.
Le général Burkhard apprécie le contact avec cet homme toujours aussi humble lorsqu’il évoque cet engagement et ses combats de la Seconde Guerre mondiale. Une rencontre qui permet à tout visiteur de relativiser.

mardi 3 août 2021

Libye : rencontre avec Alexandre Mathon

Il y a d’abord le hasard du contact. Puis la curiosité suscitée par un thème de mémoire (Bachelor) ; enfin après l’avoir lu, l’envie d’en parler. Voilà pourquoi, j’ai donné la parole à Alexandre Mathon, 20 ans, qui suit des études à l’ILERI, école des relations internationales à Paris. Pour parler de son travail sur la Libye. Sa recherche a pour titre : "Fragmentation politique et crime organisé en Libye. Instabilité et impunité dans un pays fracturé". Entretien.

  Principales routes du trafic de drogue en Libye @usip.org

- Pourquoi le crime organisé prospère-t-il en Libye ?
Ce n'est pas réinventer l'eau chaude que de dire que le crime organisé prospère sur l'instabilité, mais ça n'en reste pas moins une constante. Les théories ne manquent pas sur l'origine de ce succès : "proto-États" (voir les travaux de Skaperdas et Syropoulos) qui ressurgissent à la faveur de l'affaiblissement, voire de l'effondrement de l'État central, là où d'autres voient dans ces groupes criminels organisés les "meilleurs élèves du capitalisme" (citation de Frédéric Ploquin), aptes plus que toute autre à louvoyer dans un environnement chaotique et sans réglementations. Autre point à ne pas négliger : l'effet corrosif des trafics illégaux. Le crime organisé, qui se structure autour de ces flux, non seulement prospère dans le chaos, mais en est une source, ce qui ne manque pas d'aggraver une instabilité préexistante. Les conséquences de flux illégaux pas ou peu contrôlés sont lourdes : corruption des institutions (notamment judiciaires), évolution des mœurs (hausse des violences et des addictions) et éviction de l'économie légale. Parmi les motifs d'affrontements entre tribus Touaregs et Toubous dans le désert du Fezzan, on retrouve ainsi le contrôle des juteuses routes de la drogue et des migrants, source économique vitale pour les villes de la région.

- Quelles sont ses différentes formes ?
Parler des formes du crime organisé est délicat : l'une de ses principales caractéristiques est justement sa souplesse (l'adaptation rapide de circuits criminels pour de faux pass sanitaires en fournit un triste exemple récent) ! Pour faciliter l'analyse du crime organisé en Libye, j'ai néanmoins choisi dans mon mémoire de l'aborder par "flux", bien que dans la réalité, les acteurs de ces trafics ne se limitent que très rarement à un seul. J'ai opéré une distinction selon l'Ocindex (Organized crime index) : trafic d'armes, de drogues, d'êtres humains et de migrants (les deux allant bien souvent ensemble en pratique) et le détournement de ressources naturelles (ici de pétrole). Chacun de ces flux a ses propres spécificités et ramifications qui, bien que très intéressantes, seraient trop longues pour être exposées ici. À titre d'exemple, je prendrai l'éparpillement de l'arsenal de feu Mouammar Kadhafi. On connaît bien les liens entre l'insurrection au Mali et la guerre civile libyenne. En Libye-même, le fait que chaque milice possède un arsenal de guerre rend les conflits exceptionnellement violents et complique un peu plus la réunification sous une autorité centrale. Au niveau sociétal, "jouer au milicien", parfois avec des armes bien réelles, est un jeu répandu chez les enfants libyens.

- L'instabilité politique ne peut que lui permettre de croître ?
Le crime organisé prospère dans le chaos. Il est donc logique que, plus l'instabilité perdure, plus les flux illégaux se développent. Néanmoins, si la dimension économique est une motivation indéniable des groupes du crime organisé, elle n'est pas la seule. Si l'on observe d'autres cas historiques, comme l'UCK au Kosovo ou les Talibans en Afghanistan, on constate qu'une fois que ces groupes se retrouvent détenteurs d'un pouvoir politique, ils utilisent leur capital économique pour gagner en légitimité (ou vice-versa, dans le cas des Talibans). Le risque d’une instabilité prolongée en Libye est donc une insertion du crime organisé dans toutes les strates de la société libyenne, processus déjà largement entamé dans les faits. Dans l’hypothèse d’une stabilisation du pays, il sera donc bien plus difficile de contrôler les flux illégaux. Sans aller jusqu'au narco-État (les spécificités tribales de la politique et de la société libyenne pouvant peut-être s'y opposer), il me semble probable que le crime organisé libyen s'assure ici une pérennité, d'autant plus que la valeur de la Libye dans les flux illégaux passe surtout par sa position géographique. La Libye forme un trou dans la muraille européenne, faille surexploitée par les trafiquants de drogue et de migrants.

- Les mouvements et factions sont-ils parties prenantes ?
Absolument. L'un de mes préjugés en commençant mes recherches était que le crime organisé en Libye se composait principalement d'étrangers "spécialisés", issus de cartels et autres mafias. Rien de plus faux. Hormis quelques exceptions, comme le trafic de cocaïne (accompagné presque du producteur au consommateur par les cartels latino-américains) et le trafic d'armes (forte présence d'étrangers, en raison du réseau nécessaire pour transvaser les armes vers de nouveaux conflits), les Libyens sont majoritairement présents dans les trafics. Les myriades de groupes et milices qui composent le pays sont des acteurs majeurs, et pour cause : participer aux flux illégaux assure une manne financière non négligeable dans un pays où, rappelons-le, l'État reconnu par l'ONU a toutes les peines du monde à assurer son autorité au-delà de Tripoli. Au Fezzan, les tribus nomades et les vestiges de Daech assurent la "protection" des caravanes de drogue. Tout le long des grandes routes jusqu'à la côte, chaque milice agit de même sur son territoire, touchant une taxe de passage. Les migrants subissent un procédé similaire, avec le système des rançons à payer à chaque étape pour continuer le voyage. Sur la côte-même, les gardes-côtes libyens n'hésitent parfois pas à jouer double jeu avec l'Union Européenne, se plaçant au centre du trafic de migrants vers les côtes italiennes. L'ANL du Maréchal Haftar, quant à elle, s'est acquise une réputation dans l'exportation illégale de pétrole (normalement privilège du gouvernement de Tripoli). L'offensive du Croissant Pétrolier en 2018 s'inscrit dans une optique de guerre économique, afin de priver à la source Tripoli de ses oléoducs dans la région. Pour plus d'approfondissements, je vous invite à lire la passionnante enquête de PublicEye, "Opération Dirty Oil", qui fournit un exemple concret et détaillé du détournement de pétrole, et donne également un aperçu général du crime organisé sur la côte libyenne.

dimanche 1 août 2021

Le général Frank Barrera de Nouméa à Matignon

 

@FANC

Après avoir commandé pendant deux ans les 1500 militaires et 200 civils des Forces armées de la Nouvelle-Calédonie (FANC), le général Frank Barrera vient de quitter ce territoire situé dans une zone Indo-Pacifique dans laquelle la France « tient à prendre ses responsabilités. La France, qui promeut le multilatéralisme, se présente ici comme une tête de pont ou une avant-garde de l'Europe » a-t-il rappelé dans un entretien au quotidien Les Nouvelles Calédoniennes (LNC).
Remplacé sur le Caillou par le général Valéry Putz (voir post du 6 juillet 2021), Frank Barrera est depuis 24 h le nouveau chef de cabinet militaire du Premier ministre.