lundi 30 avril 2012

dimanche 29 avril 2012

Histoire de Camerone, Philippe Rosenpick


Le dernier café de Dien-Bien-Phu
par Philippe Rosenpick, avocat


Dans nos vies d'hommes d'affaires tendues vers la réussite individuelle, le 30 avril, le rappel du sacrifice des légionnaires permet de se ressourcer, de retrouver l'énergie en se disant que l'on est finalement pas seul à donner de l'importance à ces mots : solidarité, fierté et courage, sacrifice, humilité, le sens de la parole donnée...dans un monde sans parole qui va vers je ne sais où comme un poulet sans  tête.
Je me souviens particulièrement d'un 30 avril de pluie. Réveil à 4 h du matin, dehors il fait noir et il pleut tristement. Une pluie épaisse et hostile qui repousse vers le lit..mais c'est Camerone. Je me dis qu'il faut être un peu fou pour aller faire quatre heures de Transall pour assister à un défilé sous la pluie. Je me dis aussi que les légionnaires ne vont pas tarder à se lever pour se préparer et se mettre en place, indifférents eux à cette pluie qu'ils ignoreront, tête haute et fiers en ce jour de fête qui commémore le sens du devoir.
5h du matin, j'arrive à Villacoublay. Je vois le Transall en bout de piste qui semble greloter de froid et je me demande si le "fer à repasser" sait voler sous cette pluie. Militaires et civils arrivent au compte goutte, trempés, heureux... Retrouvailles, échanges, un petit "noir" au bar, un petit côté fin du monde...je me dis qu'il faut être fou pour sortir de son lit douillet et aller monter dans  cet avion...oui, fou de reconnaissance, de joie et de fierté. Pour la Légion et ses légionnaires.Je pense aux derniers vols pour Dien-Bien-Phu et au dernier café que ces gars ont bu avant d'embarquer, sereins...Ce soir, moi, je serai de retour !".


Histoire de Camerone, Antoine Marquet


Le sous-préfet au champs
par le lieutenant-colonel (e.r) Antoine Marquet

Cela se passa, a priori, à Camerone 1989. J'étais Officier supérieur adjoint, au 6ème étranger. Je ne sais pas pourquoi, mais j'étais désigné pour organiser Camerone...  Plus tard j'ai eu à organiser le 14 juillet à Paris pour mon régiment, alors que c'était une tâche, comme Camerone, habituellement dévolue au BOI. Mais cela me faisait plaisir,  je trouvais que ces missions m’allaient comme un gant et je m’y sentais comme poisson dans l'eau.
Le samedi précédent la cérémonie, le poste de police m'annonça "qu'une autorité en uniforme bleu se présentait à l'entrée". Fort d'une expérience vécue quelques mois auparavant - la présentation d’une autorité, sans uniforme celle-là, un samedi matin et qu'il s'agissait d'un contrôleur des armées... venant pour contrôler, je dis au chef de poste de s'installer comme chef de bord de la voiture et d'amener l'autorité jusqu'au PC, distant de cinquante mètres !
J'entendis grincer le grand escalier d'honneur et je m'avançai dans le hall devant le bureau du chef de corps et le mien. Le sous-préfet, rouge et bedonnant, mais superbe dans son grand uniforme bleu, décorations pendantes en bataille, au rang desquelles une commémorative d'Algérie montrant qu’il fut soldat, s'avança vers moi, main tendue et sourcil levé, me demanda d’un air un peu étonné, s'il était quelque peu en avance...
Je lui répondis oui... de quelque  quarante- huit heures monsieur le sous-préfet ! L'homme s'est déconfit sur place. D'assez forte corpulence, il semblait, néanmoins, n'être soutenu que par son uniforme... sans doute, eût-il aimé disparaître dans un abime autre que celui de sa perplexité.
Courtois, je le fis entrer dans le bureau du chef de corps, prévenu. Venant s'entretenir rapidement avec moi, mon chef me demanda d'organiser un déjeuner avec quelques officiers disponibles, ce qui fut fait, pour ne pas laisser partir le représentant de l'Etat  bredouille, en quelque sorte.
A table nous avons bien ri de cet épisode, même s'il nous empêchait de regagner immédiatement nos pénates... car c'était au temps d'avant les trente-cinq heures, temps où l'on travaillait encore le samedi matin…
Le sous-préfet a eu l'élégance de nous offrir le champagne frais, faisant mentir Jacques Brel dans son « Je suis un soir d'été » :
Et  la sous-préfecture
Fête la sous-préfète
Sous le lustre à facettes
Il pleut des orangeades
Et des champagnes tièdes…

Le lundi qui suivit, le sous-préfet était pile à l’heure pour la cérémonie !



Camerone outre-mer

                                                           
                                                                   Mayotte 2010

                                                          Guyane (Kourou), 3ème REI 2010

samedi 28 avril 2012

Histoire de Camerone, Jean-Marc Tanguy


                                                  Camerone à Camerone
                                                   Par Jean-Marc Tanguy, journaliste  (1)




En avril 2010 (1), Hervé Morin décide d'aller fêter Camerone à Camerone (Mexique) avec un détachement du 2e REI. Ce déplacement a aussi des visées diplomatiques (se rabibocher avec le Mexique, après la brouille consécutive au dossier Florence Cassez) et commerciales (ventes d'hélicoptères).
Via un Boeing 727 de la marine mexicaine, puis un hélicoptère CH-53 de l’armée de l’air locale, nous arrivons dans un petit village typique du fin fond du Mexique, qui s'est transformé lui aussi pour l'occasion. La venue de Français est l'évènement de l'année, sur lequel compte capitaliser le gouverneur de l'état de Vera Cruz, qui pourrait être appelé à d'autres fonctions.
Le village est pauvre, mais digne, et la population, comme souvent en Amérique du Sud en pareil cas, a tenu à recevoir ses visiteurs avec faste. Devant la modestie de leur habitat, je mesure l'effort que cela a représenté pour eux. Il y a des reines de beautés locales à cheval, et une équipée de cavaliers, chapeau de cow-boy sur la tête.
Pour toutes ces raisons, les légionnaires qui en ont pourtant vu d'autres sont évidemment saisis par l'émotion. L'accueil de la population est extraordinaire, avec des vivats. Une première cérémonie a lieu devant le mémorial qui célèbre le courage des Français et des Mexicains (en français et en espagnol), puis dans ce qui est devenu, aujourd'hui, une petite école primaire. Traversée du village, sous l'oeil curieux des autochtones, qui saluent les légionnaires. Ces derniers leur renvoient leurs saluts de la main.

                                                                        Le mémorial                 (photo jmt)

Un dernier discours, sous un même soleil de plomb, devant ce qui est présenté comme le reste de l'hacienda dans laquelle les légionnaires ont résisté, à l'époque. Une délégation de l'école d'infirmières militaires toute proche a aussi fait le déplacement sur cette place d'armes improvisée. Les Mexicains lorgnent les infirmières, les Mexicaines lorgnent les légionnaires qui ont fière allure malgré la canicule ambiante.

                                                                    L'hacienda                      (photo jmt)

Une fois les cérémonies terminées, je m'engouffre à l'intérieur de l'hacienda, devenue une sorte de petit bazar, poursuivant une escouade de képis blancs. Déjà des vétérans de l'AALE ont pris possession du coeur de l'hacienda, ombragé et fourni par la population en alcools locaux. Tout est frais, ce qui permet de reconstituer la température interne des corps.
Les gosiers français font honneur à la générosité mexicaine, et parfaitement huilés, entonnent les champs légionnaires. Les Mexicaines semblent goûter l'ensemble, posent question sur question. Et veulent, comme à l'extérieur, se faire prendre en photo avec les légionnaires.
De mon côté, je croise un vétéran légionnaire qui a fait l'Indochine, humble. Comme les autres membres du groupe de l'AALE, il est frappé par l'émotion du moment. En ce jour de Camerone, il me parle de l’Indochine de laquelle il est revenu presque par miracle. Un petit cercle se forme pour écouter.

                                                                Dans les rues                      (photo jmt)

Chacun, avec les moyens du bord, est reparti, qui, avec un caillou, une poignée de terre. Les uns et les autres sont encore là, dans un globe de verre, à côté de l'ordinateur, alors que j'écris cet article.

(1) : Jean-Marc Tanguy est le créateur du blog Le Mamouth. Il est également journaliste à Raids. http://lemamouth.blogspot.fr/

    

vendredi 27 avril 2012

Camerone 2012, Aubagne, dédicace de "Légionnaires"

La Légion m'ayant invité à dédicacer "Légionnaires", je serai lundi 30 avril à Aubagne dans le hall de Képi Blanc (KB pour tous), jusqu'à 16h30. Et espère ainsi, avoir le plaisir de vous rencontrer. Moment important  pour quelqu'un qui écrit et pour moi, en particulier.

Histoire de Camerone, Victor Ferreira


                         1996, ma rencontre avec Fred Samuel,                       joaillier argentin (1907-2006)
                               par Victor Ferreira, adjudant-chef (er)


Nous étions rentrés de l’opération HERMINE (juin à novembre 1995) et allions partir quelques jours plus tard en République Centrafricaine (mai 1996). Le colonel Antoine  LECERF, qui était mon chef de corps  au 2ème Régiment étranger d'infanterie, désigne la 1ère compagnie pour organiser la veillée de Camerone. Thème choisi : les Régiments de marche de volontaires étrangers (R.M.V.E). Le lieutenant Eric OZANNE et moi nous engageons dans cette mission. Nous décidons de retracer, en particulier, l’histoire du 22° RMVE, le régiment de Fred SAMUEL ; lequel est président de l’amicale et également un parrain du 2°REI. Un homme étonnant que j'ai rencontré à cette occasion. J’avais lu son histoire et connaissais son attachement au régiment.  Respectable, respecté, j'ai croisé un monsieur d’une très grande humilité, d'une totale simplicité et  d'une réelle discrétion, qui a su se faire un prénom… Il est venu au régiment pour la veillée avec ses camarades du 22ème RMVE. Ils étaient moins de dix… Fred m'a raconté qu'à l'aube de la Seconde Guerre mondiale, il s'était engagé dans la Légion puis, fait prisonnier,  il s'est évadé en 1941. De retour à Paris, il a repris son activité de joaillier ; cependant, juif alsacien, il subit l'interdiction d'afficher son nom sur son magasin. Samuel disparaîtra donc à jamais au bénéfice de son seul prénom, Fred. Nous sommes restés un peu en contact. Il m’a par la suite offert une parure de stylos en or et acier torsadé (pièces de collection) qui est depuis dans un coffre. Je vais maintenant aller les chercher…





jeudi 26 avril 2012

Histoire de Camerone, Christian Morisot


Illusions perdues
par le chef de bataillon (er) Christian Morisot


Nous avions ce jour là, comme disent les marins, un vent favorable et les effluves des andouillettes que nous avions habilement grillées semblaient aimantées par la Place d’Armes où se déroulait la commémoration du célèbre combat de Camerone.
Ces fantômes, ectoplasmes de fumée, venaient délicatement frôler de leur émanation odorante les narines de tous les participants à la cérémonie, provoquant chez eux, un dérèglement hormonal incontrôlable. Leurs horloges biologiques détraquées indiquaient que l’heure du repas avait largement sonné. Nous ne pouvions nous rendre sur la place, notre priorité était la préparation de « l’après défilé », il nous fallait organiser la « méga-bouffe » des affamés, le déjeuner rapide de tous les amateurs de repas « fast-food », la kermesse qui suivait ne pouvait attendre.
Pris d’une envie pressante, je me dirigeais, tout naturellement, vers les toilettes chimiques industrielles, l’urgence commandait de ne point trop attendre, même si l’accès à ces dernières était rendu difficile par l’installation imprévue de tentes qui  rendaient le parcours particulièrement  tortueux.
A mi-chemin,  je constatais que j’étais suivi par une magnifique jeune femme vêtue d’un tailleur chic qui soulignait à la perfection sa taille fine. L’instant était à la tactique d’approche, je zigzaguais, m’arrêtais ; elle zigzaguait et s’arrêtait, plus de doute, la jolie personne me suivait. Devant cette situation autant inattendue qu’agréable, je décidai de faire front, je me lançais à affronter de face la jolie môme en lui demandant de but en blanc, cœur battant, pourquoi donc, me suivait-elle ?
Celle-ci m’offrant son plus joli sourire et empruntant la même voix que les hôtesse de l’air à Orly me dit qu’elle avait demandé à un monsieur l’endroit des toilettes, il lui avait répondu : « suivez le monsieur joufflu, il y va ! ».
Je la regarde interloqué, désemparé et je me mets audacieusement à citer, tout haut, une longue litanie apprise dans mon jeune temps : « Ô ! rage, Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie. Ô cruel souvenir de ma gloire passée ».
Sans se départir de son merveilleux sourire, la femme à l’allure altière me lança une œillade à faire fondre un régiment de sapeurs et malicieusement me dit : « Très joyeux Camerone, monsieur ! »
Les andouillettes ce jour là avaient un drôle de goût…



mercredi 25 avril 2012

Histoire de Camerone, Robert Rideau


                                               


                              La parole donnée
 par le général Robert Rideau, président de la Fédération des anciens de la Légion étrangère


Il y a six années  de cela, peu avant Camerone, je suis informé par le général commandant  la Légion de la possible défection du porteur désigné. Son médecin traitant estimant inopportune l’équipée envisagée. Je suis chargé de le sonder, de faire le point afin, si nécessaire, de procéder en urgence à la désignation d’un suppléant. Je m’acquitte de ma tâche. A l’évidence le bilan n’est pas bon, il est même inquiétant. Se déplacer sur plus de cinquante mètres est une épreuve pour notre homme. Je me montre persuasif, voire  pressant. Je  trouve les mots justes car surmontant ses réticences, il s’engage  à s’entraîner au quotidien, pas à pas, pour tenir sa place, toute sa place, le jour J.
Le 30 avril, installé dans  la position  confortable du spectateur en tribune, je suis préoccupé. J’ai mauvaise conscience. Les interrogations me taraudent. N’eut-il pas été plus sage de se ranger à l’avis de la Faculté et de dissuader l’Ancien de se rendre à Aubagne ? Va-t-il tenir le coup ?
Au travers de la triple haie des pionniers, garde prétorienne s’il en est, je devine plus que je ne vois « mon » porteur. Il remonte la Voie sacrée d’un pas assuré au rythme de La Sarabande de Haendel. Quelques instants après, au pied du monument aux morts, alors que s’égrène le récit du combat de Camerone, sous un déjà chaud soleil provençal, il observe un garde-à-vous à faire pâlir d’envie un jeune engagé volontaire. Je respire mieux. La descente de la Voie sacrée est à l’image de la montée : impeccable. Je souffle !
A l’issue, comme  il est de tradition, le porteur vient se placer à quelques encablures de la tribune  afin d’assister au défilé des troupes. Ayant noté ma présence il me fait face et le visage radieux, lève le pouce en signe de victoire. « Mission accomplie »  me fait-il comprendre. Il est peu de dire que la bière que nous bûmes quelques instants après, avait une saveur plus agréable que de coutume.
Cinq années plus tard, le 12 novembre 2011, à Lille, j’accompagnais le major Otto Willems à son « dernier bivouac ». Commandeur de la Légion d’honneur, officier de l’Ordre national du mérite, Médaillé militaire, six fois cité, trois fois blessé,  prisonnier à Dien-Bien-Phu, il avait fait souffler un certain 30 avril 2006 à Aubagne, l’esprit de Camerone : celui de la fidélité à la parole donnée.

                                                  

mardi 24 avril 2012

Camerone 2012, Hubert Germain : "Je boucle l'affaire"

                                                                                                  1ère DFL

Comment avez-vous accueilli cette proposition de la Légion étrangère de vous proposer de porter la main du capitaine Danjou ?
Pour un ancien légionnaire, c’est le plus grand des honneurs. Le sacrifice du capitaine Danjou et de ses hommes définit le caractère de la Légion. Camerone en 1863, c’est une grande flamme. Mais, vous le savez, une flamme s’apaise. Ce qui est important, ce sont les braises. De génération en génération, elles sont toujours aussi ardentes. Je m’apprête, le 30 avril, à vivre un intense moment. Je suis entré à la Légion, j’avais vingt et un ans. J’en ai quatre vingt douze. Je « boucle donc l’affaire ». Et la Légion m’a accompagné toute ma vie…

Je vous sens déjà ému...
En 2012, nous commémorons le soixante dixième anniversaire de Bir-Hakeim. Je suis le dernier officier vivant de mon régiment, la 13ème DBLE, à y avoir participé. J’ai derrière moi, « l’armée des ombres ». Tellement de figures m’apparaissent et m’apparaitront lorsque je porterais la main du capitaine Danjou…Des visages d’hommes qui m’ont influencé. Cela me chamboule ! Je suis la dernière voix à pouvoir en parler. Mais cet honneur m’appartient-il ?

Chaque fois que je vous rencontre, vous utilisez le langage de la tendresse pour parler de la Légion...
La Légion, je l’ai désirée ! En y entrant, je m’imposais une obligation de résultats. A vingt et un ans, je suis dans le désert de Libye. J’ai ensuite participé à tous les combats de la Seconde Guerre mondiale menés par mon unité. Jusqu’au Rhin. Je n’ai pas eu de jeunesse. Mais grâce à la Légion, je suis devenu un homme !

Et à quatre vingt douze ans ?
R Je vis avec un passé qui m’appartient. Quel intérêt d’en parler ? Je retiens ceci : j’ai été fidèle à mon destin ! Aujourd’hui, je suis moralement déçu de ce qu’est devenu mon pays. Mais je n’ai plus rien à dire. C’est à la génération, qui a dix huit-vingt ans, de se manifester….

lundi 23 avril 2012

Camerone 2012. Hubert Germain, le dernier officier de la 13 de Bir-Hakeim

En cette année marquant le soixante-dixième anniversaire de la bataille de Bir-Hakeim (Libye), c’est  Hubert Germain qui portera la main du capitaine Danjou, le 30 avril à Aubagne (commandement de la Légion étrangère). Il est le dernier officier encore en vie de la 13ème DBLE ayant participé à la bataille et l’un des vingt huit Compagnons de la Libération vivants (la 13 est elle l'une des dix sept unités de l'armée française titulaires de la Croix de la Libération).




Fils d’un officier général, Hubert Germain parvient, le 24 juin 1940, avec trois camarades à embarquer à Saint-Jean-de-Luz à bord de l’Arrandora Star, qui appareille pour la Grande-Bretagne. En 1941, il est affecté à l’état-major du général Legentilhomme, commandant en Palestine la 1ère Division légère française libre (DFL).
Après la campagne de Syrie à laquelle il participe, il est envoyé comme élève à l’école d’officiers de Damas en septembre 1941. Aspirant, il est affecté au 2e Bureau de l'état-major de la 1ère Brigade française libre du général Koenig. En février 1942, il rejoint les rangs de la 13ème demi-brigade de la Légion étrangère et prend part à la campagne de Libye. Chef de section antichars, il se distingue dans les combats de Bir-Hakeim et est cité à l’ordre de l’armée. Promu sous-lieutenant en septembre 1942, il est des combats de l'Himeimat (El Alamein) en Egypte puis en Tunisie jusqu’en mai 1943. Blessé à Pontecorvo (Italie), le 24 mai 1944, il est évacué à Naples. H. Germain est décoré de la croix de Libération par le général de Gaulle fin juin puis participe au débarquement de Provence (août 1944), à la libération de Toulon, de la vallée du Rhône et de Lyon. Il prend part enfin aux campagnes des Vosges, d'Alsace et termine la guerre dans le sud des Alpes, au massif de l'Authion. Appelé comme aide de camp auprès du général Koenig commandant les forces françaises d’occupation en Allemagne, le lieutenant Hubert Germain est démobilisé en 1946.
Chargé de mission au cabinet de Pierre Messmer ministre des armées, de 1960 à 1962 (puis, de nouveau, en 1967 et 1968), il sera député de Paris en 1962, réélu en 1968 puis en mars 1973. De 1972 à 1974, Hubert Germain est ministre des PTT puis ministre chargé des relations avec le Parlement (mars-mai1974).

samedi 21 avril 2012

Les peines de coeur du légionnaire


Ce blog est un espace très libre. Tant aux sujets traités qu'à la manière de le nourrir. Vous le constatez, j'y parle aussi bien de la Syrie, de l'Algérie, de sujets ayant trait au renseignement, au football, à la défense et en particulier à la Légion. Et, enfin de la mémoire et du journalisme. Liberté également quant au traitement : brève, papier d'explication, commentaire...Il est enfin un sujet que j'essaie d'explorer le plus souvent possible : la vie ordinaire...Faite de succès et d'échecs, de sourires et de douleurs... C'est l'objet de ce post.

Notre premier contact, il y a quelques années, avait été bref. Il m'avait dit, avant que je ne lui en fasse la demande :
- C'est vous l'écrivain, j'ai rien à dire !
Je n'avais pas esquissé la moindre réponse, disposé un seul mot dans l'ouverture de ma bouche, qu'il avait tourné les talons. Un de mes prof de collège, qui enseignait le français se serait certainement exclamé :
- Voilà bien une adresse compendieuse ! C'est-à-dire concise mais complète. 
Le bougre revint vers moi, trois ou quatre jours plus tard. Je compris que ses copains de chambrée l'avaient rassuré quant à mes intentions. 
- Bon si vous avez besoin de me parler, je suis d'accord. Dites-le moi et je viendrai. Ce qu'il fit. Nous nous revimmes. Il racontait bien. Lorsque je partis, il vint me saluer. 
- C'était bien...mais j'ai autre chose à vous dire.
- Allez-y
- Vous êtes comme un psy, vous savez écouter.
- Alors, vous pouvez en cas de besoin appeler le psy quand vous voulez. N'hésitez pas ajoutai-je en me dirigeant vers la sortie de la caserne.
Il appela une fois le journaliste pour lui parler du livre ("Légionnaires"). Ces dernières heures, il téléphona au psy.
- Je suis mal.
- Que se passe-t-il ?
- Une femme...c'est difficile à dire.
Sachant qu'il avait terminé son premier contrat de cinq ans, je luis demandais où il en était.
- Tout est lié. Je suis parti.
- Mais vous me sembliez être dans votre élément.
- Cette jeune femme m'a tourné la tête....
Je ne parlais pas. Attendant qu'il avance dans son récit. Il combla le vide.
- Je l'ai rencontrée un jour de septembre. Je m'en souviens comme si c'était hier. Cela a immédiatement collé. J'étais fou d'elle. Dès que j'avais une seconde, j'essayais de lui parler. C'était formidable. Au bout d'un an, elle a rompu. Mais nous sommes revenus ensemble. Elle me parlait mariage. Mais un soir, pour une futilité, elle m'a écarté. J'ai compris qu'elle avait trouvé mon remplaçant. J'ai vécu un supplice pendant quelques mois ; toutefois on se parlait au téléphone. Elle m'a fait d'autres coups fumants. J'ai souffert, souffert ! Plus qu'au combat. J'ai cru en août août dernier que nous pourrions repartir. J'ai quitté la Légion pour elle. Mais une fois encore, elle a gagné du temps, tourné autour du pot. Un pas en avant, deux ou trois en arrière. Dans ma section, un canadien l'avait surnommé "je te prends, je te jette". Avec l'accent c'était cocasse...
- Rien d'inédit dans votre histoire, mais ce que vous vivez est dévastateur, dis-je. Beaucoup d'hommes (et de femmes) se sont trouvés dans cette situation, lançais-je aussitôt pour essayer de lui tendre une perche. Vous ne pouvez pas savoir combien ceci est banal. Mais votre souffrance n'est absolument pas son problème...Et depuis l'été dernier ?
- Elle m'a appelé une fois. Mais au lieu de me dire quelque chose de gentil, ce fut un désappointant : "Tu ne me téléphones plus ?". J'ai raccroché car j'ai absolument besoin de me protéger. Oui me protéger...
- Et aujourd'hui ?
- Son dernier texto semblait vouloir faire la paix.
- La paix ?
-  Mon métier a certainement rejailli sur son vocabulaire. Car de guerre entre nous, il n' y a jamais eu. Seulement le silence...
- Que souhaitez-vous faire ?
- Elle est là, présente, tous les jours. Tous les jours je pense à elle.  A-t-elle besoin de moi ? Est-elle capable de me le dire, me l'écrire ? Oui, bien sûr. Mais elle ne l'a pas fait.
Puis-je rompre le silence ? Peut-être, en fonction de ses sentiments pour moi. Mais je sais ce que je ne veux à aucun prix : renouer le contact en espérant qu'un jour peut-être..., c'est totalement et définitivement exclu. J'ai changé, beaucoup. Mûri, et quoiqu'il m'en coûte, je respecterai cette promesse que je me suis faite. A jamais.

J'étais meurtri pour cet homme. Qui souffre d'un chagrin d'amour. Habituellement, pour tenter de s'en sortir, certains tentent de rejoindre la Légion...Il a fait le contraire.
J' ai demandé à mon interlocuteur si je pouvais parler de son aventure sur ce blog. Il m'a donné son accord, à condition de ne pas citer de noms. 
- Bien sûr.
Depuis, je lui téléphone souvent. Hier, je lui ai conseillé de lire Le rabaissement de Philippe Roth. Ce matin, j'ai reçu un SMS : "Comment Roth connaissait-il mon histoire ?"."Ces histoires sont éternelles ! ", lui ai-je répondu.

vendredi 20 avril 2012

Légion étrangère. La mémoire fondatrice de Camerone

 Ils furent ici moins de soixante, opposés à toute une armée. Sa masse les écrasa. La vie plutôt que le courage abandonna ces soldats français, le 30 avril 1863. Ainsi est née la mystique légionnaire.
En cette fin avril 1863, dans l’hacienda de Camerone, les trois officiers et soixante deux légionnaires de la compagnie du capitaine Danjou résistèrent pendant toute une journée face  à deux mille Mexicains. Au soir d’une lutte forcenée, les cinq derniers survivants chargèrent à la baïonnette. En se battant jusqu’à la dernière extrémité, les légionnaires ont empêché les Mexicains d’attaquer le convoi que la compagnie devait protéger. Pour la Légion contemporaine ce combat est resté comme le symbole de la fidélité à la parole donnée, de la mission remplie quel qu’en soit le coût. Le symbole du devoir et du sacrifice, de l’honneur et de la fidélité portés à leur niveau le plus accompli.




En 1863, pendant l'expédition au Mexique, l'armée française assiège Puebla. Le 29 avril un convoi quitte le port de Veracruz chargé de vivres, et de trois millions de francs. Le colonel Jeanningros, commandant le Régiment étranger envisageant l'attaque du convoi, décide d'envoyer la 3ème compagnie reconnaître le secteur de Palo Verde. Soit soixante deux fantassins et trois officiers. Nous sommes à l'aube du 30 avril. Cette compagnie n'ayant pas d'officier disponible (ceux-ci étant atteints par le « vomito negro », la fièvre jaune), le capitaine Jean Danjou  adjudant-major du régiment (adjoint du commandant), se porte volontaire pour la commander. Le sous-lieutenant Jean Vilain payeur par interim du régiment, et le sous-lieutenant Clément Maudet, porte-drapeau, demandent à l'accompagner. Le colonel mexicain Milan, qui commande mille deux cents fantassins et huit cents cavaliers attaque…


Le 30 avril est devenue la fête de la Légion étrangère et, ce jour là, toutes les unités, où qu’elles soient, se regroupent pour assister à la lecture du récit du combat de Camerone. Ce n'est, toutefois, que depuis les années soixante dix qu'elle est célébrée avec faste.
A Aubagne,(commandement de la LE) cette cérémonie prend une dimension particulière. Le capitaine Danjou portait une main articulée. Celle-ci est conservée dans la crypte du musée de la Légion. Le 30 avril, elle est présentée devant le front des troupes,sur la Voie sacrée, portée par un "ancien" que la Légion souhaite tout particulièrement mettre à l’honneur.