dimanche 31 décembre 2023

La promotion de la Légion d’honneur distingue des personnels et des policiers intervenus lors de l’attentat d’Arras

 


Onze personnes qui sont intervenues lors de l’attentat d’Arras, qui a coûté la vie, le 13 octobre dernier à un professeur Dominique Bernard, figurent dans la promotion dite du 1er janvier de la Légion d’honneur, publiée exceptionnellement un 31 décembre. Cinq membres du personnel de la cité scolaire Gambetta-Carnot et six policiers ont été faits chevalier. Une distinction reçue, à titre posthume, après l’attaque, par l’enseignant « tué dans l’accomplissement de son devoir » (article R26 du code de la Légion d’honneur).
Cette promotion civile a été attribuée à 352 femmes et hommes (à parité). Soit 287 chevaliers, 45 officiers, 14 commandeurs, 4 grands officiers et 2 grand’croix.

dimanche 24 décembre 2023

La saut vers la liberté

 


Le journaliste Patrice Romedenne est l’auteur de ce roman « Le saut vers la liberté » (Plon) qui suit le parcours de Conrad Schumann, policier est-allemand, qui le15 août 1961 à Berlin, saute au-dessus des barbelés qui marquent la frontière avec l’ouest alors que le mur est en train de prendre forme. Un photographe présent signera une photo qui fera immédiatement « le buzz ». Une notoriété difficile à vivre. En 1998, Conrad Schumann se pendra.
J’ai gommé cette fin tragique, imaginé qu’en ce mois de décembre 2023, l’ex « vopo »* vit toujours et a écrit à Patrice Romedenne. Voici sa lettre.

*Volkspolizei-Bereitschaften  

Monsieur Romedenne,

Je suis un homme seul. Désespérément seul. Cela peut vous paraître étonnant, vu la notoriété qui est mienne depuis ce 15 août 1961. Et qui est entretenue par les journalistes du monde entier chaque année. Encore, avant-hier, j’ai fait une visioconférence avec un journaliste éthiopien. Cela me maintient en forme. Il ne se passe pas, en effet, un mois sans que l’un de vos confrères ne me pose toujours les mêmes questions. Autant vous dire que j’utilise toujours le même canevas dans mes réponses.

Je suis seul car Kunigunde mon épouse a franchi elle aussi un mur, celui de la mort, il y a vingt-cinq ans. Et qu’Erwin, mon fils, loin de moi, est en outre fort occupé.
Votre livre, dont j’attends et espère une traduction allemande, m’a été résumé par des voisins et amis, tous francophones. Et puis depuis dix jours, une jeune française qui parle un allemand délicieux a entrepris, avec dextérité, de me le lire en traduisant, en direct, telle une interprète. Elle y parvient aisément. Nous allons entamer le neuvième chapitre mais d’ores et déjà, je tiens à vous dire que j’aime le style de ce docu-fiction et la vivacité de votre écriture. En français, vous appelez cela un « roman » m’a dit Karine, ma lectrice. Comme elle aussi milite pour une traduction de votre ouvrage elle ne l’appelle plus que Sprung in die Freiheit.
Comme vous avez écrit avec discernement me semble-t-il sur mon jump d’il y a 62 ans et que ce que j’ai entendu me plaît, je voudrais vous faire une confidence. La nuit, en particulier, je rêve que la jeunesse russe franchisse ce mur intérieur et se révolte contre le potentat au pouvoir à Moscou, qui ressemble à notre stalinien Walter Ulbricht, qui était à la tête de l’Allemagne de l’Est lors de ma défection. Mais en plus sombre encore.
Si j’avais 20 ans aujourd’hui, irais-je combattre aux côtés des Ukrainiens ? Difficile à dire. Vous savez combien m’a pesé et continue de me peser cette notoriété. Mais si je pouvais utiliser celle-ci pour la mettre au service des Ukrainiens…

Voici, cher Patrice Romedenne ce que je pouvais vous dire.
Sachez que ma porte vous est ouverte.
Bonnes fêtes.

Conrad Schumann

samedi 23 décembre 2023

Vitty a disparu




- J’ai appris que tu frayais avec des miliciens et des Allemands.
- Non papa, je suis dans l’Armée secrète.
- Et moi je suis aux FTP (Francs-tireurs et partisans)...
Ce dialogue singulier entre Yvette Gaussen et son père se déroule fin 1943 ou début 1944. Il a été rappelé par le général Bachelet lorsque l'ancien inspecteur général des armées a remis la Légion d’honneur à Yvette Gaussen en avril 2016. A 17 ans, lorsque Vitty (son pseudonyme) s’engage dans la Résistance et infiltre la Milice en Haute-Savoie afin de « détricoter des opérations ennemies » comme le rappelait, il y a sept ans, le quotidien Le Dauphiné.
Yvette Gaussen la discrète, vient de disparaître à Veyrier-du-Lac. Elle avait 98 ans. Elle était l'un des derniers acteurs de la résistance intérieure (voir post du 14 décembre).

lundi 18 décembre 2023

Gérard Depardieu, la Légion d'honneur et la Grande chancellerie

 



Si, comme l’a annoncé vendredi sur France 5, la ministre de la culture Rima Abdul Malak « un conseil de l’ordre de la Légion d’honneur va se réunir et engager une procédure disciplinaire pour décider si (la Légion d'honneur de) Gérard Depardieu doit être suspendue ou pas, retirée complètement ou pas », le processus (confidentiel) est le suivant. L'intéressé est averti par le grand chancelier de l'ouverture d'une action disciplinaire à son encontre. Il lui est donné connaissance des pièces de son dossier. Ce dernier dispose alors d’un délai d’un mois précise le code de la Légion d’honneur, « pour fournir ses explications et sa défense au moyen d'un mémoire établi par lui ou par son avocat ». Ce délai peut être prolongé sur demande justifiée du légionnaire et ce dernier peut également être autorisé à présenter lui-même sa défense ou à se faire assister par un avocat.

Décision
Dans le cas où le conseil de l’ordre déciderait d’une exclusion, celle-ci doit être prise à la majorité des deux-tiers de ses membres (17). Enfin, précisons que l’article R105 dispose que « lorsque devant la gravité des faits reprochés au légionnaire, le grand chancelier estime que celui-ci ne saurait profiter des délais que nécessite l'instruction normale de sa cause pour continuer à se prévaloir de son titre de membre de la Légion d'honneur et des prérogatives qui s'y rattachent, il propose au grand maître (le président de la République), après avis du conseil de l'ordre, la suspension provisoire immédiate du légionnaire en cause, sans préjudice de la décision définitive qui sera prise à l'issue de la procédure normale ».

Précédent
Selon un proche du dossier, Gérard Depardieu aurait, quelques années après avoir été décoré de la croix de chevalier de la Légion d’honneur (1996) reçu un blâme de la Grande chancellerie pour avoir eu un comportement déplacé envers des membres des forces de l’ordre après une contravention routière. Une sanction qui n’est pas rendue publique contrairement à la suspension et à l’exclusion définitive. Ces deux dernières sont prononcées par le président de la République et publiées au Journal officiel. L’exclusion définitive est automatique en cas de condamnation par les tribunaux pour crime ou peine supérieure à un an de prison ferme.

dimanche 17 décembre 2023

Edith Piaf et son légionnaire


L'un des tableaux de la crèche @HW
A la Légion, il est difficile d’envisager Noël sans une crèche. Laissant libre cours à l’imagination des képis blancs pour concevoir, un cadre, un récit. Une crèche créée sans budget mais avec détermination, malice et récupération de matériaux. Cette composition de la naissance de l’enfant Jésus n’est souvent que le dernier élément d’une scénographie. Le dernier acte d’une pièce, le dernier tableau d’une revue, la morale de l’histoire. Ainsi cette année au Groupement de recrutement de la Légion étrangère (GRLE) à Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne).

Edith Piaf et son légionnaire
Le récit a été construit autour de la relation qu’aurait pu avoir Edith Piaf avec un légionnaire. Une fiction qui conclut une année 2023 marquée par les 60 ans de la disparition de l’interprète de « Mon légionnaire » et le 18 juin, par un mémorable concert de la Musique de la Légion (MLE) à l’Olympia (Paris).

Visites
Un officier, un sous-officier et deux caporaux-chefs ont imaginé et travaillé pendant trois mois, sur leur temps libre, sur ce projet en cinq tableaux, devenu réalité et inauguré vendredi par le général Cyrille Youchtchenko, commandant la Légion étrangère et plusieurs personnalités civiles et militaires dont le général Béchon, major général de l’armée de terre (ancien chef de corps du 1er régiment étranger de cavalerie) et le général Abad, gouverneur militaire de Paris. Cette crèche peut-être visitée jusqu’au 31 janvier 2024.

Réservations : 01 49 74 51 02

vendredi 15 décembre 2023

François Broche lauréat du prix Erwan Bergot

 


@ Armées

Fils d’un Compagnon de la Libération tué à Bir-Hakeim, François Broche est le lauréat 2023 de ce prix décerné, depuis 1995, par l’armée de terre. Titre primé : « Ils n’avaient pas 20 ans »* (voir post du 31 mai 2023). Un ouvrage publié en mai dernier dans lequel l’auteur, au travers de 18 garçons et filles, décrit les ressorts intimes de leur engagement (1940-44) contre les Allemands, contre le gouvernement dit de Vichy, contre la politique de collaboration. « Des jeunes gens qui ne voulaient pas être esclaves du fou qui avait écrit Mein Kampf » a expliqué François Broche. Le prix lui a été remis, hier soir, aux Invalides par le général Pierre Schill, chef d’état-major de l’armée de terre.

*Editions Tallandier

jeudi 14 décembre 2023

Peu à peu, ils disparaissent

 

@Fondation de la France Libre

Dans quelques mois nous célébrerons le 80ème anniversaire des Débarquements (Normandie, Provence), et de la libération d’une très grande partie du territoire français. Mais peu d’acteurs ou de témoins seront présents. Ceux qui restent ont entre 90 et 100 ans voire un peu plus. Mais cette génération disparaît. Ainsi Yolande Theule-Bacquet, dernière Française libre de l’Hérault qui vient de décéder à l’âge de 98 ans. Engagée dans la Résistance à partir de 1943, elle fut membre de Cotre-Tramontane, sous-réseau de Phratrie, et devint agent de liaison et de renseignement. Elle racontait ainsi son engagement : « À 18 ans, on n’a pas peur ! Je n’ai fait que suivre ce que faisaient mes parents ».

mardi 21 novembre 2023

La Légion étrangère ? 9 400 hommes

 

@Facebook LE

En moyenne, il s’écoule 17 jours entre le moment où le candidat frappe à la porte de la Légion et celui où il intègre le 4e RE pour y effectuer sa formation. Dans le cas, bien entendu, où il a été retenu pour porter le képi blanc. Chaque semaine, la Légion étrangère recrute ainsi une quarantaine d'engagés volontaires.
Aujourd’hui, la Légion c’est 9 400 hommes (dont 500 officiers ou cadres blancs) nés notamment en Colombie, au Brésil et au Népal. Trois pays qui fournissent environ la moitié des effectifs de l’institution.

mercredi 15 novembre 2023

Les Légions

 

@DR

Mon confrère Hervé Chabaud évoque aujourd’hui, à bon escient, sur X (anciennement Twitter) cette chronique de l’émission « Les Français parlent aux Français » à la BBC s’insurgeant « du détournement du mot Légion » par le gouvernement dit de Vichy. 
Le 14 novembre 1941, Jacques Duquesne a, ainsi, réservé son intervention aux légions de Vichy. Tout d’abord, la Légion française des combattants* : « La seule Légion, la vraie, c’est la Légion étrangère, celle qui s’est distinguée avec courage et n’a jamais eu peur du sacrifice pour servir les couleurs de la France » explique le journaliste. Et de poursuivre avec la Légion des volontaires français contre le bolchévisme (LVF) créée quelques mois plus tôt pour aller combattre avec les Allemands, sur le front de l’Est. « C’est là (avec la Légion étrangère) que se trouve l’esprit de la vraie Légion et surtout pas cette Légion des volontaires français qui ne sont que des serviles auxiliaires du gouvernement de Vichy et du IIIe Reich ».

 *organisation d’anciens combattants mise en place par le régime de Vichy.

dimanche 12 novembre 2023

L’antisémitisme décomplexé de retour

Le constat est implacable : l’antisémitisme décomplexé est de retour. La guerre entre Israël et le Hamas en est la cause visible. De retour, car dans l’entre-deux guerres puis lors de l’occupation, il était permanent. Un exemple : cette saillie, parmi d’autres toutes aussi immondes les unes que les autres, publiée le 12 décembre 1941 par l’hebdomadaire L’émancipation nationale, organe du parti Populaire Français (PPF) de Jacques Doriot : « Paris n’a jamais ignoré que les juifs vivaient en parasites sur la communauté française. La prospérité, la vie facile, l’incitaient à l’indulgence II les laissait faire, non sans leur témoigner à la fois du mépris et une certaine admiration (…) Il a fallu la guerre la défaite et ses conséquences pour que les Français se rendent compte de tout le mal que les juifs leur avaient fait ». Le Pays Libre, hebdomadaire collaborationniste, intitule une rubrique « Le juif chez nous » et plusieurs articles dénoncent cette présence. Dans une autre édition, titre d’un article le « Vider l’abcès juif »...

samedi 28 octobre 2023

Les protocoles des sages de Sion

 


Dans cette guerre Israël-Hamas, les commentateurs font souvent référence à la charte du Hamas (1988) dont l’argumentaire repose notamment sur des récits complotistes. Ainsi dans son article 32 : 
« Leur plan (celui des sionistes) se trouve dans Les Protocoles des Sages de Sion ». Ce faux, écrit en Russie en 1901 vraisemblablement par Mathieu Golovinski, est un véhicule puissant de l’antisémitisme qui développe une thèse reposant sur l’existence d’un plan d’appropriation du monde par les juifs et les francs-maçons.

Convaincre Nicolas II
Ce livre a été traduit en français en 1920. « Il se présente comme le compte-rendu de plusieurs "réunions secrètes" au cours desquelles juifs et les francs-maçons prépareraient un plan de conquête du monde » explique le journaliste Pierre Ancery*. « A l'époque, l'auteur et ses commanditaires avaient pour dessein – c'est ce qu'un grand nombre de théories supposent – de convaincre le tsar Nicolas II des dangers d'une trop grande ouverture du régime aux Russes juifs, perçus comme des éléments libéraux et révolutionnaires » poursuit-il. L’ouvrage, une contrefaçon, s’inspirerait très largement d’un livre de Maurice Joly, « Dialogue aux enfers entre Machiavel et Monstesquieu » publié sous le Second Empire.

Le péril juif
En 1921, à Londres Le Times démontre que les prétendus Protocoles  parus en France sous le titre Le péril juif, sont un grossier plagiat. La même année à Paris, Le Matin raconte ainsi leur cheminement : « Fabriqués au début du règne d'Alexandre III par ordre du général Orchewsky, l'un des dirigeants de l'Okhrana, la trop fameuse police politique impériale, jetés au panier par le général Tcheverine, le policier en chef, qui les jugea d'une trop grossière maladresse, ils furent repris et utilisés par le grand-duc Serge Alexandrovitch, en vue d'agir, par la terreur d'une conspiration imaginaire, sur l'esprit faible de Nicolas II. »

Livre saint des nazis
Un autre quotidien français, Le Temps, explique, en 1933, que ce livre a eu une réelle influence sur l’idéologie nazie et qu’il est devenu « l’un des livres saints de la nouvelle religion aryenne ». Qui fut également largement exploité en France. Ainsi ce commentaire, à l’été 1921, d’un quotidien de province : « livre d’un puissant intérêt, un livre à lire et à faire lire, car il jette sur les événements passés, présents, et probablement futurs, des lumières vraiment étonnantes ». Les journaux d’extrême-droite ont tiré avantage du « filon ». Ainsi, toujours en 1921, Léon Daudet, antidreyfusard et nationaliste, enjoint à ses lecteurs de L’Action française de se procurer le brûlot : « Lisez ce livre, vous qui cherchez à comprendre les événements (...) Lisez, et quand .vous aurez lu, méditez et surtout propagez ! . " De son côté, La Croix, alors antisémite, écrit la même année : « Nous n'avons pas d’élément suffisant pour nous prononcer péremptoirement sur l’authenticité de ces instructions qui, d'ailleurs, dans leur ensemble, ne révèlent aucune tendance ignorée. Personne n’a plus à apprendre que le juif est exclusif et dominateur... »

Influence contemporaine
Les protocoles, indique l’historien Stéphane François, a notamment « joué un rôle important dans les pogroms d’Ukraine et de Biélorussie, d’une extrême violence, entre 1918 et 1922 (125 000 en Ukraine, 25 000 en Biélorussie) ». Ils restent, aujourd'hui encore, un ouvrage de référence dans les milieux antisémites.

*Source : Retronews

vendredi 27 octobre 2023

La délégation parlementaire au renseignement 2023-2024

@ AN

Nouveau bureau à la suite du renouvellement partiel du Sénat pour l’année parlementaire. La délégation comprend huit parlementaires : quatre députés et quatre sénateurs.
Président : Cédric Perrin, sénateur (LR) du territoire de Belfort.
Premier vice-président : Thomas Gassilloud, député (Renaissance) du Rhône, président de la commission de la Défense nationale et des forces armées de l’Assemblée nationale.
Vice-présidente : Gisèle Jourda, sénatrice (Socialistes, écologistes et républicains ) de l’Aude.
Membres : François-Noël Buffet, sénateur (LR) du Rhône, président de la commission des lois du Sénat ; Agnès Canayer, sénatrice (LR) de Seine-Maritime, désignée présidente de la commission de vérification des fonds spéciaux ; Caroline Colombier, députée (RN) de Charente ; Constance Le Grip, députée (Renaissance) des Hauts-de-Seine ; Sacha Houlié, député (Renaissance) de la Vienne, président de la commission des lois de l’Assemblée nationale.
Les travaux de la délégation, créée en 2007, sont couverts par le secret de la défense nationale.

mercredi 25 octobre 2023

Drakkar, un douloureux reportage

 

@Ministère des armées

Jeune journaliste, je suis arrivé à Beyrouth quelques heures après l’attentat contre Drakkar. A l’aéroport mon nom interpella la police aux frontières libanaise, un homonyme étant recherché. Une courte vérification et je pus sortir. Ce n’est là qu’un futile souvenir par rapport au motif de mon reportage : les 58 soldats français des 1er et 9e régiment de chasseurs parachutistes tués. Eux, ne pourront plus en égrener, ne pourront se ressouvenir.
De l’immeuble de huit étages, Drakkar, il ne reste rien sinon un trou énorme. Et le sang des pierres. Accompagné par une violente odeur de mort. Le site est d’une tristesse pénétrante. Comment ne pas penser à ces hommes majoritairement jeunes dont l’avenir a été irrémédiablement confisqué ce 23 octobre 1983 par le Hezbollah, l’Iran, la Syrie, immédiatement suspectés ? Un sauveteur extrait un portefeuille et regarde une photo de famille. Il pleure.
Ici, c’est la guerre depuis 1975*. A la résidence des Pins, où campent des militaires français et des observateurs internationaux, il est très difficile de se déplacer tant les combats entre factions, positionnées alentour, sont intenses.
Je passerai la soirée de ma première journée avec le lieutenant Balavoine. Nous avons parlé longtemps de son frère, Daniel. Dans sa jeep, nous faisons un tour dans Beyrouth. Le « circuit » des récentes embuscades subies par les troupes françaises ou américaines**. La nuit le sommeil est difficile car les armes ne se taisent pas.
55 militaires du 1er Régiment de chasseurs parachutistes et 3 du 9e avaient été acheminés dans le pays pour essayer de maintenir la paix, sous tutelle de l’ONU. La paix ? La leur est éternelle !


*Cette guerre durera quinze ans, jusqu’en 1990.
**Le 23 octobre 1983, 241 soldats américains ont été tués lors d’un premier attentat

samedi 21 octobre 2023

Nouméa, un ex-militaire en garde à vue pour apologie du terrorisme

@ DR

Originaire d' Ouvéa, ce jeune homme aurait publié des messages de soutien au Hamas sur les réseaux sociaux se réjouissant, explique le quotidien "La voix du Caillou" de "la mort d' Israéliens" et apportant son soutien au Hamas. Cet ancien militaire renvoyé pour radicalisation islamiste a été entendu par la section de recherches de la gendarmerie. Fiché S, il est suivi par les services de renseignement pour son activisme pro-indépendantiste. Alors que cette garde à vue se déroulait il devait, dans le même temps, comparaître devant la justice pour "outrage à une personne dépositaire de l'autorité publique", pour avoir notamment insulté sur les réseaux sociaux Sonia Backès, présidente de la province Sud et ancienne secrétaire d'Etat à la citoyenneté. Remis en liberté, il attend maintenant la décision des magistrats.

mercredi 11 octobre 2023

L'actualité en 50 mots : constat

Un commentateur israélien le rappelait ce matin : de très nombreuses victimes ont été abattues par les terroristes du Hamas lors de la rave party et dans des kibboutz. Sociologiquement, des hommes et des femmes plutôt à gauche, favorables à un état palestinien.

mardi 10 octobre 2023

L’actualité en 50 mots : Israël

Franco-Israélienne, cette quinquagénaire qui réside dans un kibboutz près de la Bande de Gaza a vu sa mère, sa fille, sa nièce et son neveu enlevés par les terroristes du Hamas, samedi. A TF1 elle raconte : « Avant quand Israël tirait sur Gaza, je pensais aux mamans et aux enfants, d'en face... » 

mardi 29 août 2023

Un troisième militaire français tué en Irak

 

@Ministère des armées
Membre des forces spéciales, le sergent Nicolas Mazier est mort lors d’une opération antiterroriste alors qu’il était avec son unité - le Commando parachutiste de l’air n° 10 – en appui de l’armée irakienne. Le sous-officier était déployé dans le cadre de l’opération Chammal depuis le 10 juillet dernier.

vendredi 25 août 2023

25 août 1944, libération de Paris et dernières parutions des journaux collaborationnistes nationaux et régionaux

Le 25 août 1943, le quotidien La France de Bordeaux et du Sud-Ouest consacre un article au deuxième anniversaire de la fondation de la Légion des volontaires français contre le bolchevisme qui se déroulera deux jours plus tard à Paris. Les membres de la LVF se battent sur le front de l’Est, aux côtés des Allemands contre les Soviétiques. Un an plus tard, le 28 août 1944, le journal titre titre : « Paris a acclamé le général de Gaulle, la guerre, l’unité, la grandeur de la France tel est le programme du gouvernement  ». Ce sera le dernier numéro du quotidien.

lundi 21 août 2023

Un deuxième militaire français trouve la mort en Irak

L’adjudant Nicolas Latourte, du 6e régiment du génie (Angers) est décédé, hier, en Irak. Selon le communiqué de l’état-major des armées, le sous-officier « a été mortellement blessé en marge d’un exercice d’entraînement au combat en zone urbaine ». Selon le site du Courrier de l’Ouest, le militaire français serait mort « accidentellement lors d’un exercice conjoint avec les forces kurdes Peshmergas dans la région de Souleimaniyeh ». L’adjudant Latourte était déployé au sein de l’opération Chammal depuis le 21 mai.
Le 18 août dernier, c’est le sergent Baptiste Gauchot qui avait perdu la vie dans un accident de la circulation en Irak. Ce sous-officier servait, lui, au du 19ème régiment du génie (Besançon).

samedi 19 août 2023

Mort du général Jean-Louis Georgelin

 

@X (twitter)

Ancien chef d'état-major des armées, chargé de la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, le général Jean-Louis Georgelin, 74 ans, est mort hier lors d'une randonnée dans les Pyrénées ariégeoises.

Randonnée
« Le peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) » a été alerté par le gardien du refuge des Estagnous (2 246 m d'altitude), en contrebas du Mont-Valier, qui l'a informé qu'un randonneur n'était pas rentré, a précisé le parquet, ajoutant que le général randonnait seul, selon les premiers éléments de l'enquête » explique, ce midi, le site de La Dépêche du Midi. « Alerté vers 20 heures, le peloton s'est rendu sur place en hélicoptère depuis la section aérienne de gendarmerie de Pamiers et a trouvé le général décédé ».

Une carrière exemplaire
Né dans le Comminges, à Aspet (Haute-Garonne) en 1948, le général Jean-Louis Georgelin, avait été chef d’état-major particulier du président de la République (2002-2006) puis chef d’état-major des armées (2006-2010). Le 9 juin 2010, le général d'armée Jean-Louis Georgelin était nommé grand chancelier de la Légion d'honneur et chancelier de l'ordre national du Mérite.
Lieutenant-colonel, il avait commandé, pendant trois ans, un bataillon à Saint-Cyr. Il recueillit une grande estime des élèves officiers. Parmi eux, le général Thierry Burkhard, actuel CEMA.
« Avec le décès du général Jean-Louis Georgelin, la Nation perd l’un de ses grands soldats. La France, un de ses grands serviteurs. Et Notre-Dame, le maître d’œuvre de sa renaissance » a réagi sur X (anciennement Twitter) le chef de l’État, Emmanuel Macron.

lundi 14 août 2023

Mgr Piguet, évêque discuté de Clermont-Ferrand


@DR
Le titre du livre qui lui est consacré quarante-huit ans après sa mort, résume parfaitement ce que fut le prélat : Monseigneur Piguet, un évêque discuté*. Une pudeur, une litote pour me pas dire "controversé".
Né en 1887, Gabriel Piguet devient en mars 1934 évêque de Clermont-Ferrand. Il est le centième. En 1940, il reconnaît, comme la majorité du clergé, le maréchal Pétain (son voisin), comme l’homme providentiel. Le 29 septembre 1940, il signe l’éditorial de La Croix d’Auvergne dans lequel il explique que « La rénovation nationale, indispensable aux yeux de tous, ne doit pas se heurter à l'opposition camouflée de ces parasites qui regrettent le temps d'une influence disparue, qu’il s'agit pour eux de rattraper par des manoeuvres sournoises. Ce n’est plus la période des insectes ailés et gloutons. C’est la période des larves rampantes... ». L’hebdomadaire, publie le 13 octobre une lettre de l’évêque de Clermont paru dans le Bulletin de l’Enseignement libre du diocèse : « Le souffle d'en-haut, patriotique, humain inspiré de la morale chrétienne et de la devise : Famille, Travail, Patrie, anime à n’en pas douter, l'esprit, les décisions, les réformes du Maréchal Pétain ». Nouvel exemple parmi d’autres, le zèle laudateur de Mgr Piguet se manifeste deux semaines plus tard dans l’éditorial « Le père de nos pères » qu’il signe dans La Croix d’Auvergne : « L’exemple du grand Chef dont la vigoureuse vieillesse s'avère capable de toutes les renaissances pour le bien de la Patrie, est le vivant symbole du don de soi demandé aux jeunes Français ».
Mgr Piguet fut l’homme de son temps, celui de l’obéissance à Vichy manifestée par l’église catholique. Celui où une majorité de l’épiscopat  s’engagea dans le champ politique. Après deux années d’occupation, il fut de ceux, semble-t-il, qui manifestèrent un sursaut.

Juste parmi les nations
Arrêté devant ses fidèles par les Allemands, le dimanche de Pentecôte 1944, l’évêque de Clermont-Ferrand est envoyé au Struthof puis à Dachau. On lui reproche, explique son biographe Marc-Alexis Roquejeoffre « de n’avoir pas donné l’autorisation à la Gestapo d’installer une antenne de transmission sur les tours de la cathédrale. On lui reproche aussi d’avoir fait protéger un prêtre nommé Jean Gay, de son vrai nom, Jean de Viry, résistant alsacien réfugié en Auvergne. On lui reproche enfin d’avoir usé de son autorité auprès des institutions religieuses catholiques du diocèse pour cacher plusieurs adolescents juifs ». Dans le camp de concentration bavarois, il fera clandestinement prêtre un jeune diacre allemand, Karl Leisner, qui mourra peu après la libération du camp. Rentré en Auvergne, Mgr Piguet mourra lui en 1952. Cinquante ans plus tard, il fut fait Juste parmi les nations par Israël.

*Ecrit par Marc-Alexis Roquejeoffre et le père Martin Randanne.

samedi 12 août 2023

Jean Moulin, le héros oublié ?

Sur le site Babelio, 32 livres consacrés à Jean Moulin sont référencés. Encore ne s’agit-il que d’une petite partie des ouvrages écrits sur l’initiateur et le président du Conseil national de la Résistance. Parmi ces titres figure le dernier en date, celui de Fabrice Grenard qui vient d’être publié par les éditions Plon*. Avec un sous-titre paradoxal, « Le héros oublié ». Car huit décennies plus tard, le nom de Moulin, comme évidemment celui de De Gaulle, est encore souvent prononcé et donc connu. En revanche, il est évident que le parcours de Moulin est sinon oublié, tout au moins dans sa globalité, totalement ignoré. Et c’est l’un des atouts de cet ouvrage, que de le rappeler dans ces onze chapitres, dans un style accessible et pédagogique. « Héros », un terme, aujourd’hui utilisé à tort et à travers, mais qui doit évidemment être accolé au nom de l’un des premiers Français à refuser d’abdiquer, en juin 1940.

Caluire
Ils sont si peu nombreux ces hommes et ces femmes qui, immédiatement ou ultérieurement, ont pris des risques insensés, pouvant conduire jusqu’à la mort, pour essayer de retrouver « leur » France. Avec précision, l’auteur raconte l’engagement du haut fonctionnaire, ses rencontres avec le général de Gaulle, la résistance intérieure, les luttes de pouvoir dans la clandestinité, les égos, l’insatisfaction. Et l’arrestation de Caluire. L’invraisemblable guet-apens, lorsqu’on analyse, depuis fin mai-début juin 1943, faits et comportements qui ont conduit au pire. Un engrenage de difficultés, de malheurs et de mensonges. Puis la mort du héros, après que l’un des résistants arrêté ait craqué face à la torture subie et désigné Max, l’un des pseudos du représentant du général de Gaulle, l’homme qui en savait tant sur l’organisation de la Résistance intérieure. Moulin lui n’aura jamais parlé face à ses bourreaux.

*Fabrice Grenard, Jean Moulin, le héros, oublié, Plon, 15,90€

dimanche 23 juillet 2023

La dernière mission du général Putz à Nouméa

 

21 juillet, le COMSUP sur le HMAS Canberra @Twitter

Mardi à Nouméa, en cet hiver austral, la journée du président de la République commencera à 7h30 . Par une (traditionnelle) prise d’armes au monument aux morts, place Bir-Hakeim. Emmanuel Macron y sera, notamment, accueilli par le commandant supérieur des Forces armées en Nouvelle-Calédonie, le général Putz. Qui a servi à son état-major particulier pendant quatre ans, jusqu’à l’été 2021.
Le COMSUP rentre de Sydney (Australie) où il a participé au lancement de Talisman Sabre 2023, exercice interarmées qui réunit 30 000 militaires de 13 nations. Les FANC fournissant une compagnie et un Casa.
A l’issue de la visite du chef de l’État, Valéry Putz quittera la Caillou pour rejoindre Paris. Pour occuper les fonctions de chef de la "division plans, programmation et évaluation" à l’état-major des armées. Celui qui fut, entre 2014 et 2016, chef de corps du 2e régiment étranger d’infanterie (Légion étrangère) prendra, à cette occasion, une troisième étoile (voir post du 9 juillet).

samedi 22 juillet 2023

Emmanuel Macron se rend en Nouvelle-Calédonie

 

© NC la 1ère
Il s’appelle Philippe Vigier et ce sont les Calédoniens qui, les premiers, le rencontreront. Nommé ministre délégué aux Outre-mer jeudi, l’ancien député d’Eure-et-Loir (Modem) doit actuellement être plongé dans le délicat dossier calédonien. Pour son premier voyage ministériel, M. Vigier accompagnera en effet le président de la République qui est attendu lundi soir à Nouméa. Emmanuel Macron séjournera avec sa délégation sur le Caillou jusqu’au 27 au matin (décalage horaire + 9h en Nouvelle-Calédonie).

Second voyage du président en Calédonie
Le premier en mai 2018, s’était déroulé à la veille du processus référendaire d’autodétermination. Retenons cette phrase prononcée alors par le président de la République : « La France serait moins belle sans la Nouvelle-Calédonie ». Trois consultations ont, en effet, été organisées en 2018, 2020 et 2021 et ont penché, avec des marges différentes, pour un maintien dans l’ensemble français.
Après le troisième référendum, quel enseignement pouvait-on tirer ? Qu’absolument rien n’était réglé ! Et que seule la bonne volonté des deux camps et de l’État pourrait déterminer cet avenir apaisé indispensable à la Calédonie, ce « destin commun ». On avait alors l’impression de revenir en arrière…

Le dégel du corps électoral
Après une période creuse qui a suivi ce troisième référendum, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer a relancé les discussions politiques sur l’avenir du Caillou, se rendant trois fois en six mois sur place. Obtenant qu’indépendantistes et anti indépendantistes reprennent le dialogue sur l’avenir du territoire.
Parmi les points les plus complexes, la question du dégel du corps électoral alors que se profilent les élections provinciales, l’année prochaine.
Dans un rapport d’information sénatorial (commission des lois) publié le 12 juillet, les rapporteurs insistent « sur la nécessité d’accomplir aussi un véritable geste symbolique de décolonisation par le président de la République, incarnation de l’État et dépositaire de son histoire. » Ce geste pourrait, à leurs yeux, être utilement réalisé par Emmanuel Macron lors de ce déplacement en Nouvelle-Calédonie.

Le discours de la place des Cocotiers
Des annonces pourraient effectivement être faites par le président lors du discours qu’il prononcera place des Cocotiers, à Nouméa. Baptisée également place de la Paix en juin 2022, concomitamment à l’inauguration de la statue de la poignée de mains entre Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur en 1988. Annonces sur l’avenir institutionnel mais aussi donc sur la partie mémorielle, à savoir la colonisation. Que dira, ou ne dira pas Emmanuel Macron ? Les paroles présidentielles sont très attendues.

Une Légion d’honneur
L’un des premiers gestes qu’accomplira le chef de l’État en Nouvelle-Calédonie sera de remettre l’insigne de commandeur de la Légion d’honneur à Marie-Claude Tjibaou. Veuve du leader indépendantiste assassiné en mai 1989 à Ouvéa, celle-ci a notamment présidé le conseil d'administration de l'Agence de développement de la culture kanak (ADCK). Membre, durant la période référendaire du Conseil des sages chargé de s’assurer du bon déroulement des débats, Mme Tjibaou a également été membre du Conseil économique, social et environnemental.

Indo-Pacifique
A l’issue de cette visite calédonienne, Emmanuel Macron se rendra à 600 Km de là, à Vanuatu. L’ancien archipel des Nouvelles-Hébrides, ex-condominium franco-britannique jusqu’en 1980. Un pays où la présence chinoise s’est largement renforcée ces dernières années. Pékin ne manque d’ailleurs jamais de mettre en avant « la communauté de destin sino-vanuataise ». Un cas 
 « très intéressant » de l’évolution croissante de l’influence chinoise dans la région. Paris a nommé en novembre dernier ambassadeur à Port-Vila, Jean-Baptiste Jeangène Vilmer, directeur de 2016 à 2022, de l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire (IRSEM) du ministère des Armées. Le président de la République terminera ce voyage par Port-Moresby. La Papouasie-Nouvelle-Guinée (qui s’est rapprochée également de la Chine) et la France ont en commun de renforcer leur coopération en matière de transition énergétique et de protection de la biodiversité. Sujets qui devraient être présents tout au long de cette séquence dans le Pacifique Sud.

vendredi 21 juillet 2023

L’adieu aux armes du général Bellot des Minières

 

Le général Bellot des Minières, septembre 2018 © Armées

« Un officier de Légion ne prend jamais le large sans revenir à sa patrie » indiquait Sébastien Lecornu en retraçant le parcours du général Eric Bellot des Minières, le 6 juillet dernier, dans la cour d’honneur des Invalides (Paris). A l’occasion de la cérémonie marquant l’adieu aux armes de l’inspecteur général des armées-terre. Le ministre des armées poursuivait : « Le 7 juin 2008, vous recevez le commandement du 2e régiment étranger parachutistes de Calvi, là ou tout à commencé et alors que devant son drapeau aujourd’hui, l’aventure s’achève... »

Le testament

Une carrière militaire qui prend fin après 39 années de service, 19 affectations, près de 7 années passées en opérations rappelait, ensuite, le général d’armée Bellot des Minières, dans son intervention. Prise de parole qui constitue, en quelque sorte, le testament du partant.
« J’ai aimé cette vie de soldat, vous l’avez compris (…) et j’y ai beaucoup appris ». Evoquant immédiatement la mémoire de ces hommes qui ont payé le prix du sang . « Je suis redevable de la vie d’Heller, Penon, Hutnik, Rygiel, Cocol comme des près de 200 blessés qui se sont engagés sous mes ordres, en opérations ». Des hommes d’exception « au sens du service parfois sans limite ».

jeudi 20 juillet 2023

La Légion change aujourd'hui de chef


Le général Youchtchenko, le 13 juillet au Sénat ©HW

Entre Marseille et Aubagne, il y a une vingtaine de kilomètres. C’est la distance que va parcourir aujourd’hui le général Cyrille Youchtchenko, qui après trois ans comme chef d’état-major puis deux ans comme général adjoint à l’officier général de la zone de défense et de sécurité Sud quitte la cité phocéenne pour la ville qui vit naître Marcel Pagnol. Et qui abrite le commandement de la Légion étrangère.
Ce 20 juillet, une cérémonie intime aura lieu au quartier Viénot, au cours de laquelle s’opérera donc le transfert d’autorité entre COMLE « descendant » et « montant », en présence du major général de l’armée de Terre.
Dernière séquence en fin de journée où officiers, cadres et légionnaires diront « adieu » au général Alain Lardet, après trois années passées à la tête des képis blancs.

dimanche 16 juillet 2023

Avant la rafle du Vel d’Hiv, le "tennis-juif" d'un hebdomadaire collaborationniste

© DR

Dans son édition du 10 juillet 1942, l’hebdomadaire Je suis partout - un titre d’extrême droite fondé en 1936 qui sera une figure de proue de la collaboration - interpelle à la une ses lecteurs : « Savez-vous jouer au tennis-juif ? ». La question est posée par Pierre-Antoine Cousteau, qui deviendra l’année suivante rédacteur en chef du titre, à la suite de Robert Brasillach. Cousteau d’abord un homme « à l’extrême gauche de l’extrême gauche », comme il s’était lui-même défini, avant de devenir fasciste.

Définition du « tennis-juif »
Dans cet article, de trois colonnes, Cousteau explique en quoi consiste le « tennis-juif ». Celui-ci se joue à deux et consiste « avec son partenaire à apercevoir un juif et à l’annoncer. Le vainqueur est celui qui a distingué le premier, le plus grand nombre de juifs ».
L’auteur de ces lignes avait auparavant précisé que « la partie se dispute au cours d’une promenade. Mais rien en s’oppose à ce que le match s’engage à une terrasse de café, dans une file d’attente, dans le hall d’une perception ou à la sortie de la messe... »

16 juillet, la rafle
Six jours après la parution de ce texte, débutait la rafle dite du Vel d’Hiv ; 13 152 juifs de 2 à 60 ans, apatrides (il s'agit notamment de Juifs anciennement Allemands, Autrichiens ou Polonais) furent arrêtés par la police française. La plupart d’entre eux seront ensuite dirigés vers les camps d’internement français de Pithiviers et Beaune-la-Rolande (Loiret), avant de partir vers la mort à Auschwitz-Birkenau. Seuls quelques dizaines reviendront.

samedi 15 juillet 2023

Décès du dernier combattant de la Seconde Guerre mondiale vivant en Polynésie

© Facebook, Haut-commissariat Polynésie
Starr, Tetoa, Ariiteuira Teriitahi est mort jeudi au sud de l’île de Tahiti, à l’âge de 99 ans. Né en 1924, il s’était engagé comme matelot en 1943 dans les Forces navales françaises libres. Embarqué le 1er septembre 1944 sur le Cap des palmes* il va faire toutes les campagnes jusqu’au 1er août 1945. Il participera ainsi à des escortes de convois dans le Pacifique Sud, notamment en Nouvelle-Calédonie. Starr Tetoa Ariiteuira Teriitahi avait été fait chevalier de la Légion d’Honneur il y a deux ans.
Un ancien combattant du bataillon du Pacifique est encore en vie. Il réside en métropole.


*Cet ancien bananier, une fois armé, naviguera dans les secteurs de Guadalcanal, des Nouvelles-Hébrides et de la Nouvelle-Calédonie sous les ordres du capitaine de frégate Georges Cabanier. Il est alors intégré à la 3e Flotte américaine.

vendredi 14 juillet 2023

Andrée Gros élevée à la dignité de grand’croix de la Légion d’honneur

©DR

Le 14 août, Andrée Gros-Duruisseau fêtera son 97e anniversaire. Cette résistante, déportée à Ravensbrück vient d’être élevée à la dignité de grand’croix de la Légion d’honneur.

Résister immédiatement
Issue « d’une famille charentaise aimante », la jeune Andrée glissera naturellement dans la Résistance. Et ce dès 1940, après la débâcle, en ouvrant la porte de leur ferme aux réfugiés et aux fugitifs. Une étape supplémentaire est rapidement franchie. La famille est chargée par un réseau d’organiser la réception de caisses d’armes larguées de nuit par des avions anglais, de les camoufler. Des pilotes américains transitent également par la ferme. Andrée devient agent de liaison et homologuée agent P2 au BCRA. La maison familiale est située à 5 km de la ligne de démarcation.
Début 1944, son réseau est dénoncé. Le 15 mars, la ferme familiale est investie par les Allemands. Son père parvient à fuir. Elle, qui a 18 ans, est conduite à Angoulême par des agents de la Gestapo.

Sortie vivante de l’enfer
Deux mois et cinq jours d’interrogatoire. « Ils savaient à peu près tout de nous, mais ignoraient où le groupe se cachait. Seuls mon père et moi le savions. Je n’ai jamais parlé. »* Le 20 mai, le jeune fille est conduite au fort de Romainville où elle reste jusqu’au 6 juin. Puis est transférée dans un wagon à bestiaux au camp de Neue Bremm près de Sarrebruck. Première image vue : des hommes, accroupis près d’un plan d’eau sont battus par des SS. « C’était horrible ». Elle poursuit ensuite la route de l’enfer qui la mène à Ravensbrück où elle est affectée dans plusieurs usines. « Le fait de savoir que je n’avais dénoncé personne m’a donné beaucoup de force » explique-t-elle. Andrée Duruisseau (son nom de naissance) parvient à sortir vivante de cet enfer. Elle retrouve sa famille le 1er juin 1945. Après une longue période d’hospitalisation, la dépression la saisit. Elle rencontre, un militaire, Robert Gros et fonde une famille. Elle le répète toujours aux jeunes : « Nous n’avons jamais baissé les yeux ».


*La Cohorte, mars 2018

jeudi 13 juillet 2023

Traditionnelle prise d’armes de la Légion à Paris


Lors de cette cérémonie, 50 engagés ont reçu leur képi blanc

« Les légionnaires aiment cette prise d’armes et y tiennent » expliquait, ce matin, dans les jardins du Luxembourg (Paris) le général Alain Lardet, commandant la Légion étrangère. Cérémonie à laquelle participaient des éléments des quatre régiments qui défileront demain sur les Champs-Elysées. Le 1er REC pour le défilé des troupes motorisées ; les régiments du socle pour les troupes à pied : GRLE, le 4e RE, le 1er RE qui seront précédés par les pionniers et la musique. C’est le COMLE qui sera à la tête des légionnaires. C’est la troisième fois, dans sa carrière militaire que le général Lardet, participera au défilé. Et la seizième et dernière pour le chef de musique hors classe Emile Lardeux, à la tête de cinquante-huit musiciens légionnaires. Ce matin, celui-ci a reçu la croix de chevalier de la Légion d’honneur des mains du général Lardet. Tous deux étaient très émus.
COMLE pour une semaine encore, Alain Lardet qui a récemment reçu sa troisième étoile, deviendra ensuite sous-chef plans et programmes auprès du major général de l’armée de Terre.

mardi 11 juillet 2023

La question


©capture d'écran BFM

Léon Gautier aura résisté jusqu’à la dernière extrémité. Jusqu’à franchir le cap des cent ans. Dès la fin de l’adolescence, il lutta. A 17 ans, engagé volontaire dans la marine, il défendit Cherbourg ; puis la défaite consommée, traversa la Manche, rejoignit, en juillet 1940, l’armée de Gaulle naissante. Son grand combat fut celui du 6 juin 1944 où, avec ses 176 camarades des commandos Kieffer, il débarqua à Ouistreham. Il eut de la chance et survécut. Au fil du temps, il devint le dernier. Ce temps passant, on lut cela comme un moment de gloire. Comme l’écrivain Ernest Renan, Léon Gautier estimait que « la célébrité va rarement chercher ceux qui ont fait profession de fuir la gloire et dont la qualité dominante a été la modestie ».

Les derniers
Nous le savons, inéluctablement, les derniers vont disparaître. Dernier terrien, dernier aviateur, dernier marin, dernier ou dernière résistante, dernier ou dernière rescapé(e) des camps… Le dernier ce n’est pas le cancre, la lanterne rouge, c’est un homme ou une femme courageux qui dans des temps maudits a su simplement « faire quelque chose » pour son pays. Ce sont les mots d’Hubert Germain, dernier des 1 038 Compagnon de la Libération disparu en octobre 2021. L’ancien lieutenant de la 13e Demi-brigade de Légion étrangère qui avait élevé à la dignité de grand officier de la Légion d’honneur Jean Camus, ancien du BCRA, qui est mort vendredi, jour des obsèques de Léon Gautier, à l’âge de 107 ans à l’institution nationale des Invalides à Paris.

Qui en 2023 se lèverait ?
En regardant à la télévision la cérémonie d’adieu à Léon, « la question » que, comme beaucoup, je me pose depuis mon adolescence est revenue. Si j’avais vécu à l’heure de l’humiliation de l’été 1940, qu’aurais-je fait ? A jamais, l’interrogation restera sans réponse.
Mais cette fois-ci, immédiatement, une autre colle a fait son apparition. Un autre hic a succédé à la première interpellation. Si aujourd’hui la France était confrontée à une situation de chaos, de soumission, de désarroi, comparable à celle vécue par ces jeunes de 1940 que feraient les garçons et les filles de 2023 ?
Qui sans bruit ou envolées tenterait « de faire quelque chose » ? Dirait « non » ! Qui manifesterait ce courage, dans des conditions rendues bien plus complexes par la puissance des technologies ? Qui risquerait sa vie ou celle de ses proches ? Qui franchirait l’écran des jeux vidéo pour être dans le vrai combat qu’implique une résistance pour tenter d'accélérer l'issue ? Quels anonymes quitteraient le fauteuil du 20e rang pour monter sur la scène du courage ? Ne suivant pas l’exemple des Européens qui lors de la formation du bataillon du Pacifique fin 1940 à Papeete haranguaient les Polynésiens : « Engageons-nous, partez ! »
Quels personnages connus franchiraient le pas ? Au nom d’une certaine idée de la France ? Qui privilégierait les valeurs ? A toutes ces questions, un exemple contemporain, proche et lointain, celui de l’Ukraine pourrait fournir quelques pistes.
Il y aurait d’agréables surprises. Pas forcément celles que l’on imagine. Et d’autres évidemment amères. La question ne sera pas tranchée, heureusement. Pas de réponse, donc. Mais une musique lancinante...

dimanche 9 juillet 2023

Le général Latil futur patron des FANC

©Linkedin

C’est en effet ce jeune général de brigade (nommé en avril dernier), jusqu’ici chef de la "cellule stratégie capacitaire" au cabinet militaire du ministre des Armées, qui s’apprête à rejoindre Nouméa où il prendra, le 1er août, le commandement des Forces armées de la Nouvelle-Calédonie et de la base de défense. Cet ancien aide camp du président François Hollande, né en 1972, succédera au général Valéry Putz qui rejoint Paris où il occupera les fonctions de chef de la "division plans, programmation et évaluation" à l’état-major des armées. Et prendra, à cette occasion, une troisième étoile.

lundi 3 juillet 2023

Mort de Léon Gautier

Il était le dernier des 177. Ces commandos conduits par Philippe Kieffer qui, le 6 juin 1944, avaient débarqué en Normandie. Léon Gautier est décédé ce matin à l'âge de 100 ans.
Le livre des derniers combattants se referme ; ils ne sont plus, en effet, qu'une poignée ces hommes et ces femmes engagés dans les Résistances, extérieure et intérieure, les survivants des camps. Il est précieux, lorsque c'est encore possible, d'écouter leur parole. De comprendre leur engagement pour défendre "leur" France. Plus encore aujourd'hui où les repères tombent petit à petit.

Un sapeur-pompier de Paris meurt en Seine-Saint-Denis



Le caporal-chef Dorian Damelincourt âgé de 24 ans est mort cette nuit alors qu’il combattait un feu dans un parc de stationnement couvert à Saint-Denis (93). Il aurait été victime d’un arrêt cardiaque. Né à Bourg-Saint-Maurice (Savoie) ce jeune pompier s’était engagé en août 2019.

dimanche 2 juillet 2023

Le général Mistral, futur gouverneur militaire de Lyon



©Légion étrangère

Ancien commandant de la Légion étrangère (2018-2020) où il a fait rentrer les légionnaires dans l’ère Scorpion, ancien chef de corps du 4e régiment étranger (2009-2011), le général Denis Mistral deviendra, le 1er août, gouverneur militaire de Lyon, officier général de zone de défense et de sécurité Sud-Est et commandant de zone terre Sud-Est. Soit 25 000 hommes répartis sur douze départements des régions Auvergne et Rhône-Alpes. Le gouverneur militaire de Lyon (titre honorifique et protocolaire) est l’héritier d’une longue succession de représentants de l’autorité militaire : sénéchaux du Moyen-Age, gouverneurs du Lyonnais de la Renaissance à la Révolution, commandants militaires au XIX° siècle, devenus gouverneurs depuis 1873.
Actuel sous-chef d’état-major en charge des opérations aéroterrestres à l'état-major de l'armée de Terre, le général Mistral, qui prend sa quatrième étoile succédera au palais Vitta, au général Gilles Darricau.

mardi 6 juin 2023

Le 6 juin 1944 vu par Aujourd’hui, quotidien parisien

 

©DR

Il faut évidemment attendre le mercredi 7 juin 1944, pour lire l’annonce du Débarquement dans la presse française. Les journaux qui paraissent alors ont donné beaucoup de gages au gouvernement de l’Etat français (Vichy) et aux Allemands. Ainsi Aujourd’hui, quotidien parisien qui est publié depuis 1940 et dont la ligne, au fil des mois, est devenue collaborationniste, titre : « Débarquement anglo-américain sur la côte normande. La riposte des troupes allemandes fut immédiate ». Le journal publie, également, en première page l’appel radiodiffusé du maréchal Pétain : « La France devient un champ de bataille, obéissez aux ordres du gouvernement… ». Aujourd’hui, cite également le chef du gouvernement, Pierre Laval qui demande aux Français de ne pas prendre part aux combats. Enfin, le quotidien mentionne la déclaration du secrétaire d’Etat à l’information et à la propagande (et redoutable polémiste), Philippe Henriot qui se trouve en voyage à Berlin. Celui-ci explique « que si l’invasion échoue, comme je le crois, Roosevelt et Churchill paieront très cher leur échec ».

jeudi 1 juin 2023

Jean-François Lhuillier, l’homme de Tripoli de la DGSE

 


C’est un livre inhabituel. Car parler, avec des brassées de détails, du rôle d’un chef de poste de la Direction générale de la Sécurité extérieure l’est. Evoquer les classiques incompréhensions entre « l’envoyé spécial permanent » et le staff parisien, au sein du monde du silence, l’est également. Pourtant, « la vision que ce livre servirait de règlement de compte est non seulement réducteur mais, tient même du contre-sens » précise dans cet entretien Jean-François Lhuillier. L’intérêt du livre (Mareuil éditions) n’échappera ni aux connaisseurs, ni aux amateurs du « bureau des légendes ».


Ce livre aurait pu avoir pour titre « Voyage au coeur de la DGSE » ?
Pour partie seulement, l’idée initiale n’était pas de parler de la DGSE mais de raconter mes « aventures » à mes petits-enfants. Mais effectivement, ma vie professionnelle a épousé celle de ce grand service pendant une trentaine d’années alors...

...Tant ces 350 pages, nous permettent de vivre un zeste du quotidien, du climat de la Direction générale de la sécurité extérieure ?

Je ne pouvais pas me raconter sans relater l’atmosphère régnant à certains échelons du Service, expliquer les nouvelles règles régissant les mœurs de la Boîte depuis la démilitarisation de 1990, à l’origine de certains travers que je souligne.

Vous y décrivez assez clairement le rôle d’un chef de poste, son fonctionnement, son environnement, ses missions. Notamment en période de crise. Vous avez choisi l’essai, non le roman. Pourquoi ?
Il y a suffisamment d’excellents romanciers qui font vivre les agents secrets dans un monde onirique ! Ma démarche initiale n’était pas de raconter une nouvelle histoire à mes petits-enfants, ce que j’adore faire par ailleurs, mais de leur parler de ma vie, leur dire le jeune homme que j’étais, animé par le goût de l’action et le service de mon pays, et l’adulte que je suis devenu mûri au sein du service spécial de la République. Le roman n’avait donc pas sa place, mais « L’Homme de Tripoli » tient malgré tout du roman en un sens...

Sur un sujet aussi sensible, on peut se demander pourquoi vous avez pris le risque d’écrire cet ouvrage ? Pour régler quelques comptes ? Pour expliquer « que cela se passe comme cela ? ». Pour parler de la Libye vue de votre poste d’observation, poste opérationnel ?
La vision que ce livre servirait de règlement de compte est non seulement réducteur mais, de mon point de vue, tient même du contre-sens. Non, je ne m’inscris pas dans ce type de démarche même si les rapports humains que je décris, une réalité vécue, sont parfois incroyables et tellement éloignés de ce qui préside à la cohésion qui devrait être la base de nos relations internes. Mais je ne pouvais pas m’en abstraire, car je devais expliquer au mieux le milieu dans lequel j’évoluais influençant mes propres actions… Oui, l’idée d’expliquer le véritable vécu d’un chef de poste de la DGSE est ce qui m’a guidé. Cela n’avait jamais été fait jusqu’à présent et en écrivant à mes petits-enfants, j’ai découvert que cette histoire pourrait intéresser le plus grand nombre, en particulier peut-être certains décideurs chargés de la défense des intérêts de notre pays...

La série « Le bureau des légendes » a-t-elle contribué à vous pousser à l’écriture ?
J’ai adoré cette série, une excellente fiction qui tient du Canada Dry, vous savez cette boisson gazeuse qui se comparait au champagne !

« L’homme de Tripoli » c’est aussi illusions et désillusions ?
Le monde des illusions n’est pas celui des agents secrets. Au contraire, notre quotidien est celui du réel, parfois le plus cru, comme on en trouve l’exemple dans le livre.
Les désillusions non plus n’ont pas leur place quand on est dans l’action, ou bien on change de métier ! Se battre reste une valeur fondamentale pour adapter le monde qui nous entoure aux grands principes dans lesquels on croit. C’est à l’heure du bilan, au moment où l’on se retourne vers son passé que ce type de sentiment peut vous étreindre. Mais vous voyez, malgré les vicissitudes, à moins que ce ne soit grâce à elles, j’ai la sensation d’avoir vécu pleinement ma vie professionnelle.

Le cloisonnement semble avoir parfois des effets pervers ?
Le cloisonnement est à la fois nécessaire et pervers. Comme dans toute chose l’excès tue. La mesure a des difficultés à s’imposer contre la démesure, l’homme est ainsi fait !

Quelles sont les réactions de « la Boîte » à la publication de ce livre ?
La Boîte n’a pas l’habitude de réagir ouvertement. Ce que j’espère c’est que le témoignage que j’apporte dans cet ouvrage, et qui est encore une fois un vécu d’une trentaine d’années au sein du Service, servira aux responsables pour corriger ce qui peut l’être non seulement dans l’organisation structurelle du Service. De ce point de vue, espérons que les mesures prises à l’automne dernier par le directeur général M. Bernard Emié aillent dans le bon sens, mais aussi sur l’aspect cohésion et relations humaines, à la manière des Armées, pour retrouver une dynamique de groupe qui fait parfois défaut.

Une dernière question au connaisseur de la Libye. Maintes fois posée, évidemment. Khadafi était depuis si longtemps une préoccupation de la France... François Mitterrand, en son temps, avait refusé une mission de neutralisation. En 2011, nous avons été partie plus que prenante dans l’insurrection. Une bonne idée ?
« L’Homme de Tripoli » apporte une réponse à cette question. De mon point de vue, utiliser les évènements de février 2011 pour renverser un dirigeant qui était en cours de rapprochement avec les Occidentaux tient de la faute morale et fut aussi une erreur géopolitique catastrophique dont les multiples conséquences se font toujours sentir aujourd’hui.

mercredi 31 mai 2023

La révolte des jeunes après la défaite de 1940, analysée par François Broche


Dans son dernier ouvrage « Ils n’avaient pas 20 ans » (Taillandier), François Broche raconte l’engagement de jeunes filles ou garçons anonymes qui ont dit  « non » à la défaite, l’Occupation, Vichy et le régime de l’État français. Ils avaient pour point commun d’être jeune, très jeune. Ils s’appellent Jeanine Morisse, Léon Bouvier, Louis Cortot, Jacqueline Fleury, Pierre Ruybet, Mathurin Henrio, tué alors qu’il avait 14 ans...

François Broche, ces jeunes gens s'engagent pour "faire quelque chose"?
C’est la motivation qui est partagée par tous les jeunes résistants, à côté d’autres motivations plus précises, comme les origines familiales ou régionales, les raisons d’ordre spirituel ou moral, la révolte devant la défaite ou le souvenir de la Grande Guerre. « Nous avions un vocabulaire extrêmement simple, disait Anise Girard : nous disions ‘’faire quelque chose’’, on faisait ou on ne faisait pas. » Faire quelque chose, cela commence par des actions de fourmis dont parle Colette Marin-Catherine, une « petite main » de l’Organisation civile et militaire, qui commence par confectionner des gerbes de fleurs pour les tombes des résistants fusillés.

On ne peut comprendre cette mécanique si on ne tient pas compte de cette humiliation immense née de la défaite de 1940 ?
La révolte devant la défaite - qui n’est pas seulement militaire, mais aussi et surtout morale - est un puissant facteur d’engagement. « Je ne supportais pas l’idée de la défaite, je voulais me battre », dit Pierre Lefranc. Et, bien sûr, ils ne supportent pas non plus l’Occupation : Berty Albrecht confie qu’elle en a tellement souffert qu’elle a tout de suite trouvé « les moyens de leur faire le plus de mal possible ». Le futur pilote du groupe Lorraine, Jacques de Stadieu veut « casser la gueule aux Allemands, les foutre dehors ».

La révolte de ces jeunes garçons, de ces jeunes filles est individuelle ?
Elle revêt toutes les formes, elle est à la fois individuelle et collective. On commence par tracer des « V » sur les murs, par déchirer les affiches collaborationnistes, par distribuer des tracts. Ces simples actions incitent à rejoindre un groupe de résistance, car la révolte individuelle marque vite ses limites. Les actes collectifs sont évidemment plus efficaces, plus spectaculaires, comme la fronde des étudiants de Paris le 11 novembre 1940 ou les sabotages exécutés par les cinq lycéens de Buffon, qui seront fusillés le 8 février 1943.

Des jeunes gens "orgueilleux d'être français" pour reprendre la formule utilisée par Colette Marin-Catherine ?
Elle emploie cette expression à propos de son frère, un garçon de 19 ans mort à Dora en mars 1945. Il est vrai que « la veine patriotique », pour reprendre une expression de Jean-François Muracciole dans son étude de référence sur la sociologie des Français libres, est importante, mais il me semble que ce qui prime tout de suite, c’est le caractère insupportable, physiquement insupportable, de la présence allemande.

Face à pareille situation, peut-on imaginer comment se comporteraient ces filles et ces garçons qui ont 20 ans en 2023 ?
Je suis historien, non futurologue ! Cela dit, je me sens en accord avec le général Simon, l’ancien chancelier de l’Ordre de la Libération. Dans son avant-propos à mon album sur Bir Hakeim, il s’interrogeait sur l’état d’esprit des jeunes générations « en cas de circonstances graves » : « En y réfléchissant, écrivait-il, je ne vois pas de raison sérieuse de douter des jeunes générations. Je suis sûr qu’elles se révéleraient dans l’action, dès qu’elles prendraient conscience de la faillite des responsables. Bien sûr, nous avions reçu une éducation, nous avions des principes, nous croyions à des valeurs qui n’ont plus cours aujourd’hui […]. Il me semble que, dans une tragédie comparable – au moins par son envergure – à celle de 1940, elles pourraient être réactivées. Il me plaît de le croire parce que je ne veux pas mourir complètement désespéré. »