dimanche 13 septembre 2020

"Paroles de rebelles" au musée de l'ordre de la Libération


« Je n’ai pas entendu l’appel du 18 juin, je ne connaissais pas même le nom du général qui l’a prononcé et faisant partie du détachement précurseur du bataillon de chasseurs alpins. Dans cette nuit du 18 juin, on a réussi à embarquer sur un ferry en partance pour la Grande-Bretagne avec la plus grande partie du bataillon. On a passé le goulet de Brest à minuit dans la fumée des réserves de pétrole qui brûlaient […]. Nous nous sommes confié mutuellement notre intention de nous engager dans l’armée anglaise, compte tenu de la certitude que nous avions que l’Angleterre continuerait la lutte. » Ainsi se raconte Pierre Dureau. À l’heure des choix, sous-lieutenant, il sert au 6e bataillon de chasseurs alpins et rentre de Norvège. Ce sera la France libre puis plus tard, la 13e Demi-brigade de Légion étrangère dont 900 des 1619 membres ont choisi, le 30 juin 1940, de rester en Angleterre et de continuer le combat avec le général de Gaulle.

Le sous-lieutenant Pierre Messmer qui a entendu le 17 juin, le discours du maréchal Pétain demandant l’armistice, résume : « Ça n'a pas été un conflit entre l'honneur et la discipline ; l'honneur nous commandait d'être indiscipliné. »

D’autres jeunes militaires hésitent : désobéir c’est abandonner des camarades, mettre ses proches restés en France ou en Afrique du Nord en danger, être jugé et condamné (par contumace) par Vichy… Continuer à se battre avec ce général de Gaulle inconnu mais courageux ? Serons-nous assez nombreux ? Allons-nous regretter ce choix ? Allons-nous en mourir ? Voilà quelques-unes des questions que se posent alors ces hommes. L’histoire nous apprend qu’ils ont gagné et que le sacrifice de certains a permis de remporter la victoire. J’ai cité des militaires de la 13* mais d’autres se sont posés les mêmes questions, de même que beaucoup de civils qui rapidement ou ultérieurement rejoindront la Résistance intérieure.

Ce sont à ces « Paroles de rebelles » qu’est consacrée l’exposition qui s’ouvre le 17 septembre au musée de l’ordre de la Libération à Paris (jusqu’au 3 janvier 2021). « Malgré tout ce qui pouvait les différencier, sexe, âge, géographie, statut social, éducation, convictions politiques…, ces hommes et ces femmes ont su se retrouver dans un combat commun pour la libération de la France » explique Vladimir Trouplin, conservateur du musée. Sur les 1038 compagnons de la Libération, 790 se sont engagés en 1940…

* Les compagnons de la Libération de la 13, Mareuil éditions, 2020.