RCA. Qui fait encore confiance à Idriss Déby ?
Crédit : présidence République Tchad |
Au cœur de l’histoire figurent trois acteurs. La France, le
Tchad et un homme aussi incontournable qu’ambigu : Idriss Deby. Qui ne doit
d’être encore au pouvoir à Ndjamena qu’à l’intervention des troupes françaises
de l’opération Epervier en février
2008, sans laquelle la rébellion l’aurait emporté. En retour et pour
simplifier, disons qu’il a rendu un fier service aux troupes françaises au Mali
(Serval), cinq ans plus tard.
L’ambition de M. Deby qui vient de fêter vingt trois années
de pouvoir (« accompagné » en 1990 par la France) est de faire de son
pays une puissance régionale. Dans sa vision politique, la RCA est considérée
comme une province tchadienne. Idriss Déby a ainsi mis naguère en place le
président Bozizé (2003), avec l’accord de Paris, puis l’a lâché,
vraisemblablement pour indocilité économique (enjeux pétroliers des bassins de
Doseo et Salamat, au nord de la RCA). Puis il a donc, dix ans plus tard armé,
financé la coalition Séléka qui a
pris le pouvoir à Bangui en mars dernier.
Environ 10.000 ressortissants tchadiens vivraient à Bangui.
Mais les Centrafricains originaires du nord du pays sont souvent considérés
comme des Tchadiens, des « Arabes ». Auxquels il faut ajouter les
Tchadiens de la Séléka et les soldats
réguliers de l’armée tchadienne présents au sein de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (MISCA, interposition). En outre, des Tchadiens assurent la
sécurité du président « intérimaire » Michel Djotodia et des chefs Séléka. Ce mélange rend confuse une
situation déjà terriblement complexe : les représentants militaires
d’Idriss Déby n’ont, selon de multiples témoignages, jamais hésité à
fournir des tenues militaires tchadiennes ou des brassards de la FOMAC (Force d'Afrique centrale remplacée le 19 décembre par la MISCA) aux Séléka, qui ont ainsi conservé leur
armement.
Nombreuses sont les voix, militaires ou diplomatiques
françaises, humanitaires, centrafricaines, qui désormais s’élèvent pour
dénoncer la responsabilité majeure d’Idriss Déby dans le chaos meurtrier. Une source évoque une réunion qui se serait tenue le 4
décembre dernier à l’ambassade du Tchad à Bangui, au cours de laquelle le chef
de mission aurait transmis aux responsables Séléka, les consignes du président
Déby en cas de renversement du pouvoir en RCA. Que l’on peut résumer
par : « Menez alors la politique de la terre brûlée ! ».
Selon cette source, les Français ne seraient pas ménagés. Et de conclure :
« Qui vous dit que les balles qui ont tué les deux parachutistes n’étaient
pas tchadiennes ? ».