Jean-Luc Mélenchon et l'appropriation de l'histoire

Ainsi, selon Jean-Luc Mélenchon ce serait "la rue qui a abattu les nazis." Une curieuse vision de l'histoire présentée, hier, par le leader de la France insoumise au terme d'une manifestation contre la réforme du code du travail.
Charles Gonard était toujours dubatif quand on lui parlait de la France résistante. Il répondait en prenant un exemple. La visite du maréchal Pétain à Paris, le 28 avril 1944. Une foule immense est rassemblée sur le parvis de l'hôtel de ville et l'acclame. Charles Gonard relativisait, en effet, l'image d'une France prétendument résistante qui prit son essor après la libération de la France. Où il fallait alors rassembler et reconstruire.
Je cite ici Charles Gonard, disparu en juin 2016, car cet homme de l'action immédiate réalisa, avec ses hommes, en 1944, l'une des plus importantes opérations de la Résistance : l'exécution, le 28 juin, de Philippe Henriot, secrétaire d'Etat à l'information et à la propagande de Vichy, remarquable orateur qui était l'un des personnages les plus emblématiques de l'ultra-collaboration. Lorsque deux jours plus tard, sa dépouille fut exposée place de l'hôtel de ville entre 15h et 21h30, 13 500 personnes viendront se recueillir devant le corps du héraut milicien. Chiffre cité par le directeur de la police municipale dans un rapport au préfet de police. 
Avec Charles Gonard, l'histoire des 1037 autres Compagnons de la libération (Résistance intérieure, BCRA, SOE...) pour ne citer qu'eux, est peuplée de dénonciations, d'arrestations, de torture. Certains se sont suicidés pour ne pas parler, d'autres ont été fusillés, d'autres ne sont pas revenus des camps, d'autres ont été tués lors d'affrontements avec les Allemands ou des supplétifs français. Souvent leur famille ont payé un prix exorbitant. Le constat est le même pour tous les hommes et femmes engagés dans une libération de la France qu'ils n'ont pu voir. Sur d'autres champs de bataille, au Levant, en Libye, en Tunisie, en Egypte, en Italie, en France, en Allemagne, en Belgique, en Hollande, en Indochine... des hommes qui ont rejoint les Forces françaises libres (FFL) ont également payé de leur vie leur choix. Un choix qui a toujours été individuel. Effectué en leur âme et conscience. 
C'est pour cela que l'appropriation de l'Histoire par M. Mélenchon, hier, est choquante. La rue n'est pas concernée. A Paris, le 19 août 1944, le Conseil national de la Résistance a appelé à l'insurrection. Y ont participé des résistants de 1940 (peu nombreux, peu ayant survécu à la répression) et des années suivantes ainsi que des hommes et des femmes volontaires dans les dernières jours de l'occupation de la capitale. 
Le sacrifice et le souvenir de gens qui étaient loin d'être majoritaires dans la population, mérite que l'on respecte la réalité de l'Histoire.

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