Aliyev, un pouvoir dynastique en Azerbaïdjan
Chaque jour, consciencieusement, l’agence de presse officielle d’Azerbaïdjan rend compte sur son site, de l’activité d’Ilham Aliyev et met en ligne des photos du président. Une routine éditoriale dans cette dictature du Caucase où aucune télévision ni radio indépendante n’émet depuis le territoire, et où tous les journaux critiques ont été fermés, constate l’association Reporters sans frontières.
Une gestion patrimoniale musclée de l’Azerbaïdjan qui repose sur un contrôle des élites et une captation des actifs économiques. En s’assurant ainsi qu’il n’y ait pas de fortunes concurrentes.
Népotisme
Ilham Aliyev règne depuis 2003 et a pris la suite de son père, Heydar. Un héritage construit dès 1993, deux ans après l’indépendance de l’ex-république soviétique par un papa qui géra, depuis 1944, sa carrière dans les entrelacs du KGB local.
En 2003, le fils est élu à la présidentielle avec près de 76,84% des voix, remplaçant ainsi son père malade. En 2008, Ilham Aliyev l’emporte avec 88,73% ; 85% en 2013, 86% en 2018 et 92,1% en 2024. Une stabilité que ne pourraient qu’envier des chefs d’Etat régulièrement désignés. En Azerbaïdjan « on se contente de convoquer une clientèle électorale, sévèrement encadrée » explique le journaliste français Régis Genté, basé à Tbilissi en Géorgie.
Un pays à disposition
Prévoyant, cet habile politique de 63 ans a désigné Mehriban Aliyeva à la vice-présidence de ce pays producteur de pétrole et de gaz. Celle-ci est son épouse et donc également « première dame ». Une jeune sexagénaire dont le clan semble avoir le vent en poupe et qui a changé un peu la nature d’une économie de prédation « mettant fin dans certaines provinces aux féodalités tenues par des oligarques placés par son époux, pour les remplacer par des gens en apparence plus éduqués, à l'occidentale souvent, mais dont la fonction est tout autant de faire perdurer le régime comme tel » précise Régis Genté. Elle est aussi à l’origine de la nomination du ministre de l’Economie et du patron du Fonds souverain. Le couple préparerait leur fils à la succession*.
Erdogan et Poutine
Sur le plan régional, « Aliyev a su s’appuyer sur un autre joueur, Erdogan, commente Régis Genté. Aliyev a gagné son soutien, y compris militaire, pour reprendre la province sécessionniste du Haut-Karabagh. Les deux hommes s'appellent volontiers « frères ». Avec Poutine, Aliyev manoeuvre sans le brusquer, en le neutralisant en quelque sorte, en gagnant à chaque pas le soutien d'Erdogan. »
Les petits gestes entretiennent les relations. Ainsi avec Moscou lorsque Bakou mène campagne contre la France en Nouvelle-Calédonie et dans l’outre-mer. « De Paris, Ilham Aliyev attend la reconnaissance de ce qu'il considère être la légitimité de Bakou à contrôler le Haut-Karabagh » estime Régis Genté. Un présupposé pour la libération des otages français, Martin Ryan et Théo Clerc détenus par l’Azerbaïdjan ?
*Les Aliyev ont un fils et deux filles
Photo : visite d'un centre de loisirs par la famille Aliyev, le 18 avril 2025 ©Azertac.