Nouvelle-Calédonie (2) 1988, Grande Terre, Ouvéa : la guerre civile
Le 3ème et dernier référendum destiné à déterminer l'avenir de la Nouvelle-Calédonie se tiendra d'ici octobre 2022. A quelle date ? Une proximité avec la présidentielle en ferait, potentiellement, un enjeu de l'élection. Et rappellerait 1988. Je vous livre ces souvenirs de l'époque, racontés dans un livre "Opération Victor" (1989).
Il est souvent nécessaire dans ce métier de tordre le coup aux évidences. Si je suis ce vendredi 22 avril 1988 à Nouméa, c’est en écoutant le flash de France Inter que j’apprends l’attaque de la brigade Fayaoué à Ouvéa. La mort de quatre gendarmes tués par des Mélanésiens (un cinquième, un officier est grièvement blessé) et la prise en otages de 24 gendarmes mobiles et deux territoriaux. Ces gendarmes n'étaient pas armés ou n'ont pas eu le temps de se servir de leurs armes.
Ouvéa, aéroport 1988 ©A.P. |
Il est souvent nécessaire dans ce métier de tordre le coup aux évidences. Si je suis ce vendredi 22 avril 1988 à Nouméa, c’est en écoutant le flash de France Inter que j’apprends l’attaque de la brigade Fayaoué à Ouvéa. La mort de quatre gendarmes tués par des Mélanésiens (un cinquième, un officier est grièvement blessé) et la prise en otages de 24 gendarmes mobiles et deux territoriaux. Ces gendarmes n'étaient pas armés ou n'ont pas eu le temps de se servir de leurs armes.
Je suis en Nouvelle-Calédonie, où j’ai travaillé six mois en 1985 à RFO, pour La Cinq. Nous sommes à deux jours du premier tour de l’élection présidentielle.
Avec une équipe de RFO, un photographe du quotidien Les Nouvelles calédoniennes nous parvenons à louer un avion privé et nous posons sur l’aérodrome d’Ouloup. Dans un premier temps, nous sommes enfermés dans un hangar afin que nous ne filmions ni ne photographions les corps des gendarmes envoyés à Nouméa par avion militaire. Nous sommes autorisés ensuite à nous rendre à la gendarmerie où nous faisons notre reportage.
Le dimanche, jour des élections sur la Grande Terre, c’est l’ébullition. « La marmite saute » à Canala où de graves incidents se déroulent. Devant la mairie, un gendarme mobile est grièvement blessé par un tireur embusqué. Quelques heures plus tard, alors que des barrages empêchent tout accès à la cité de la côte est, un peloton de mobiles est la cible d’indépendantistes. Une balle touche une grenade. L’explosion blesse 6 gendarmes. En début de soirée, la gendarmerie qui surplombe Canala est attaquée. Des fermiers caldoches ou mélanésiens hostiles à l’indépendance sont chassés. Parfois, leurs habitations sont brûlées. On parlera aussi d’un viol…
La Calédonie est devenue folle. L’épidémie gagne du terrain. Le lendemain, 25 mai, alors que nous nous sommes à l’entrée de Canala et que Nicolas le cameraman filme, nous sommes brutalement interceptés par des gendarmes du peloton d’intervention (qui s’appelait alors ELI pour Elément léger d’intervention) de Nouméa. Nous sommes au pied du calvaire. Cela ne s’invente pas ! Le moteur de la voiture tourne. Ils ne nous laisseront pas le couper. Les insultes fusent. Les gendarmes nous conduisent manu militari dans leur VBRG. Le cameraman reçoit un coup de crosse sur la tête. En nous interpellant, les militaires ont essuyé des coups de feu. Ils répliquent. Le serveur de la mitrailleuse s’énerve. Des rafales partent du véhicule blindé. Puis nous sommes conduits à la gendarmerie. Tout s’arrange pour nous. Sauf que quelques minutes plus tard, l’ambiance devient glaciale. Nous apprenons que lors des tirs de riposte qui ont suivi notre ridicule interception, une jeune fille de 17 ans qui se trouvait devant la mission d’où elle était sortie, en spectatrice, a été tuée par une balle perdue… A suivre.
La Calédonie est devenue folle. L’épidémie gagne du terrain. Le lendemain, 25 mai, alors que nous nous sommes à l’entrée de Canala et que Nicolas le cameraman filme, nous sommes brutalement interceptés par des gendarmes du peloton d’intervention (qui s’appelait alors ELI pour Elément léger d’intervention) de Nouméa. Nous sommes au pied du calvaire. Cela ne s’invente pas ! Le moteur de la voiture tourne. Ils ne nous laisseront pas le couper. Les insultes fusent. Les gendarmes nous conduisent manu militari dans leur VBRG. Le cameraman reçoit un coup de crosse sur la tête. En nous interpellant, les militaires ont essuyé des coups de feu. Ils répliquent. Le serveur de la mitrailleuse s’énerve. Des rafales partent du véhicule blindé. Puis nous sommes conduits à la gendarmerie. Tout s’arrange pour nous. Sauf que quelques minutes plus tard, l’ambiance devient glaciale. Nous apprenons que lors des tirs de riposte qui ont suivi notre ridicule interception, une jeune fille de 17 ans qui se trouvait devant la mission d’où elle était sortie, en spectatrice, a été tuée par une balle perdue… A suivre.