Le Rwanda, David musclé des Grands Lacs



Petit pays dévasté en 1994 par le génocide des Tutsi, le Rwanda suscite la fascination en Afrique et ailleurs, pour ses succès économiques, la réussite de sa pacification et le savoir-faire politique de son président, l'autoritaire Paul Kagamé. « La puissance n’est pas possible pour ce pays. L’influence, oui » explique un bon connaisseur du dossier. « C’est vrai que le Rwanda a opéré un relèvement magistral et du coup provoque admiration et jalousie des pays du continent » confirme un autre.

RDG et M23
Un autre sentiment prévaut toutefois : « l’agacement diplomatique » pour reprendre un constat, feutré, formulé dans une chancellerie. Et ce pour ses agissements militaires dans l’est de la République démocratique du Congo dont Kigali a fait son terrain de chasse depuis le génocide, qui a fait en 100 jours entre 800 000 et un million de morts parmi les Tutsi et les Hutu modérés. Le gouvernement de Kigali y a alors poursuivi les Hutu responsables de ce spectre d’horreur qui s’étaient réfugiés dans ce qui était encore le Zaïre.
Aujourd’hui, le « pays aux 1 000 collines » allègue toujours la présence en RDC d’anciens génocidaires hutu pour justifier l’incursion de ses soldats en soutien des troupes du M23 qui occupent Goma, ville qui compte 1,5 million de réfugiés. Kigali explique que ce sont là des « mesures de défense actives. » L’Europe condamne ainsi que l’ONU. Un rapport d’experts mandatés par cette dernière indique que les Forces de défense rwandaises (FDR) « contrôlent et dirigent de facto les opérations du M23, [ce qui] rend le Rwanda responsable des actions du M23 ». Le même unanimisme n’est pas de mise côté africain.

Une face moins visible
Cette présence rwandaise masque un autre versant. « Le régime de Kigali contrôle ainsi largement l’exploitation de métaux rares au détriment de son voisin » note le responsable d’une ONG. Et surtout, il ne faut pas négliger la volonté d’expansion territoriale d’un « pays neuf » pour utiliser l’expression d’un diplomate français qui fut en poste dans la région des Grands Lacs. Pourtant, la RDC et le Rwanda se sont engagé fin avril au respect de leur souveraineté respective. Un accord de paix pourrait d’ailleurs être signé entre les deux pays le mois prochain aux Etats-Unis. Entre un David (superficie du Rwanda, 26 338 km²) dont la croissance du PIB a été de +8,2 % et un Goliath (2,34 millions de km² pour la RDC) aux pieds d’argile, miné par l’absence d’Etat, la misère et la corruption.

Une armée efficace
Sur le podium des armées subsahariennes, les FDR sont formées de moins de 50 000 hommes. « Très proches de nos standards » note un expert militaire, ces troupes ont réussi à considérablement réduire la puissance de feu des insurgés liés à l’Etat islamique (EI) dans la province du Cabo Delgado au Mozambique, qui abrite le plus grand projet industriel en Afrique « là où Wagner s’est cassé les doigts » rappelle un industriel français. Une intervention en partie financée par l’Union européenne. 
L'armée rwandaise est, par ailleurs, un important contributeur des forces de maintien de la paix dans le monde (soldats et policiers). Le troisième.

Photo : portrait officiel de Paul Kagamé  ©Flickr

Posts les plus consultés de ce blog

Sordide commentaire

Destins communs

Et Marie- Laure Buisson...