samedi 28 janvier 2012

Bir-Hakeim, l'esprit de Verdun


Deux ans, jour pour jour après les désastres de mai et juin 1940, une unité française, la 1ère brigade française libre, affronte pour la première fois les Allemands. Jusque là, ils n'ont été engagés que contre les Italiens en Syrie, contre des Français fidèles au gouvernement dit de Vichy. Ils sont 3700, Français (et légionnaires étrangers) venus de partout, dans ce désert, à Bir-Hakeim. Ils sont commandés par le "vieux lapin", surnom de Koenig.
Pierre Messmer qui commande une des compagnies de Légion étrangère (13ème DBLE) témoigne : Dans le dur calcaire gris ou jaunâtre, chaque unité creuse des emplacements pour les armes et leurs servants, des abris pour les véhicules et pour les PC (...). Bientôt, les trous individuels, d'abord couverts d'une simple toile de tente, sont coffrés de murs et quelquefois de toits dont les éléments sont des touques de quatre gallons en fer blanc, dans lesquelles est distribué l'essence (...). Les touques remplies de sable, servent de gros parpaings pour nos constructions. L'espace désolé de Bir-Hakeim est parsemé de blocs aux formes variés (...) paysage lunaire où campe une troupe de nomades (cité par Jean-Louis Crémieux-Brilhac, "La France Libre", Gallimard, 1996).
Ces hommes ne disposent ni de chars, ni d'artillerie lourde. Le 26 mai 1942, les Italiens mènent l'attaque. les Allemands suivent. Le siège dure du 2 au 10 juin.
Jean Tranape, engagé volontaire en Nouvelle-Calédonie raconte : Chaque jour, nous sommes bombardés par l'aviation (de Rommel). Imaginez-vous un seul instant cet enfer ? Nous nous battons à un contre dix. Nous sommes encerclés, on s'y attendait...mais le moral reste excellent. (in "Les Compagnons de la Libération", H Weill, Privat, 2006). La Luftwaffe mènera mille trois cents attaques. Les positions françaises tiennent ; les hommes sont exténués. Koenig écrit : Une tente enterrée sous laquelle reposent une vingtaine de blessés reçoit une bombe (...) qui tue les occupants. A un moment donné, un chirurgien opère couché (JL Crémieux-Brilhac, op. cit).
Le 9 juin, l'eau commence à manquer. Le commandement britannique avertit Koenig que la défense de Bir-Hakeim n'est plus essentielle. Celui-ci choisit une sortie dans la nuit du 10 au 11 juin, à 23h30. Elle se fait sur un passage de 200 m de large. Les Allemands lancent des fusées éclairantes. Il faut zigzaguer. Mais c'est un succès. Deux mille cinq cents hommes sont récupérés par la colonne de secours. Bilan (durant la bataille et lors de la sortie) : cinq cents morts, quatre cent cinquante à cinq cents prisonniers survivants et cinq cents blessés graves. 
Bir-Hakeim a retardé l'offensive de l'Africa Korps sur Tobrouk. Le quotidien britannique Daily mail estimera dans son édition du10 juin 1942 (dernier jour du siège) que Bir Hakeim prouve que l'esprit de Verdun est toujours vivant !